(1713) Les illustres Françaises « Les Illustres Françaises. Histoires Véritables. »
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(1713) Les illustres Françaises « Les Illustres Françaises. Histoires Véritables. »

Les Illustres Françaises.
Histoires Véritables.

Paris n’avait point encore l’obligation à Monsieur Pelletier, depuis ministre d’État, d’avoir fait bâtir ce beau quai, qui va du pont Notre-Dame à la Grève, que sa modestie avait nommé le quai du Nord, et que la reconnaissance publique continue à nommer de son nom, pour rendre immortel celui de cet illustre prévôt des marchands ; lorsqu’un cavalier fort bien vêtu, mais dont l’habit, les bottes et le cheval crottés, faisaient voir qu’il venait de loin, se trouva arrêté dans un de ces embarras, qui arrivaient tous les jours au bout de la rue de Gesvres ; et malheureusement pour lui les carrosses venant à la file de tous côtés, il ne pouvait se tourner d’aucun. Un valet qui le suivait était dans la même peine, et tous deux en risque d’être écrasés entre les roues des carrosses, si ils avaient fait le moindre mouvement contraire. La bonne mine de ce cavalier le fit regarder par tous les gens des carrosses, dont il était environné. La crainte qu’ils eurent du danger qu’il courait, les obligea de lui offrir place. Il acceptait leurs offres, et ne délibérait plus que du choix d’une des places qui lui étaient offertes, lorsque l’un de ces messieurs, vêtu d’une robe de Palais, l’appela plus haut que les autres. Il le regarda, et crut le reconnaître. Il vit bien qu’il ne se trompait pas, lorsqu’il recommença à crier, en se jetant presque tout le corps hors de la portière. Venez ici Monsieur Des Frans. Ha ! Monsieur, répondit-il, en descendant de cheval, quelle joie de vous voir et de vous embrasser ! Il alla à lui, monta dans son carrosse, et fit monter son valet derrière, aimant mieux risquer ses chevaux, que de laisser ce garçon dans le hasard d’être blessé. Cette action qui fut remarquée, ne laissa plus douter que ce ne fût un homme de qualité. Les maîtres des carrosses recommandèrent à leurs cochers de prendre garde à ne point offenser ces chevaux. Des Frans entendit cet ordre général, et remercia ces messieurs d’un air qui leur fit connaître qu’ils ne se trompaient pas dans la bonne opinion qu’ils avaient de lui. Ces civilités respectives eurent leur effet ; et les chevaux, contre toute apparence, sortirent de cet embarras dans le même état qu’ils y étaient entrés. Le valet remonta sur le sien, conduisant celui de son maître par la bride, et suivit le carrosse dans lequel il était monté.

Que j’ai de joie de vous voir et de vous embrasser, mon cher Monsieur Des Ronais, dit-il, en entrant dans ce carrosse ! Et moi, répondit le conseiller, car c’en était un effectivement, je reçois aujourd’hui en vous embrassant, la joie la plus sensible que j’aie eue depuis longtemps. Vous vous rendez donc, poursuivit-il, à vos amis, après les avoir attristés par votre absence ? Oui, reprit Des Frans, je me rends à mes amis, à mes parents, et à moi-même, en me rendant à ma patrie, dont mes malheurs m’ont si longtemps banni ; et c’est un heureux augure pour moi, d’avoir trouvé en arrivant, le plus cher et le plus sincère de mes anciens camarades. Je ne vous questionnerai point, ajouta-t-il, sur votre santé, je m’aperçois qu’elle est bonne ; mais vous voulez bien que je vous demande des nouvelles de ma famille. Madame votre mère est morte, dit le conseiller. Je le sais depuis longtemps, reprit Des Frans, en soupirant ; mais mes oncles, n’avez-vous rien à m’en dire ? Non, répondit le conseiller, si ce n’est qu’ils ne sont point à Paris ni l’un ni l’autre. Tant pis, reprit Des Frans, car je ne sais présentement où aller loger. Vous ne vous souvenez plus que nous sommes bons amis, reprit en riant le conseiller, ma maison est assez grande pour vous et pour moi ? Et à présent que je sais que vous n’avez point de retraite fixe, vous me feriez injure, si vous preniez un logement ailleurs que chez moi, où j’espère que vous serez logé avec assez de commodité, parce que comme j’ai cru me marier il n’y a pas longtemps, j’ai meublé une maison très vaste, et je suis seul qui l’occupe. Je ne refuse point vos offres, reprit Des Frans : ce qui m’y aurait pu obliger eût été la crainte de vous incommoder ; mais puisque vous m’assurez qu’il n’en sera rien, je reprends volontiers les anciens errements de notre amitié, et j’agirai avec vous sans façon. C’est m’obliger, reprit Des Ronais, et vous ne me feriez pas plaisir d’en user autrement.

Comme ils en étaient là, le carrosse arriva au logis, où ils mirent pied à terre. Des Ronais le conduisit dans une chambre, et ordonna qu’on servît promptement. Voulez-vous que nous vivions sans façon, lui dit Des Frans ? C’est ainsi que je l’entends, reprit Des Ronais. Cela étant, ajouta Des Frans, ne trouvez pas mauvais que je ne sois point aujourd’hui des vôtres à dîner, ni peut-être encore à souper. Je suis engagé ailleurs, où il faut que je me rende incessamment. Ce n’est qu’à cette condition-là qu’on m’a laissé venir ; et je ne veux rester ici qu’autant de temps qu’il m’en faut pour changer de linge et d’habit, et faire prendre ma mesure ; c’est pourquoi je vous supplie d’envoyer chercher votre tailleur. Quoi ! dit le conseiller, vous ne dînerez point avec moi ? Non, répondit Des Frans, je vous supplie de m’en dispenser ; et croyez qu’il faut que des affaires d’honneur et de conséquence m’appellent ailleurs, puisque je romps si promptement visière à la civilité, en ne vous tenant pas compagnie. Vous être le maître, dit Des Ronais, mais tout au moins, en attendant votre tailleur, vous boirez bien un coup à ma santé ; quatre si vous voulez, reprit Des Frans en riant, mais laissez-moi m’habiller ; car dans l’état où je suis, crotté et vilain, je me fais peur à moi-même.

Des Ronais le laissa seul avec son valet, qui avait apporté une valise. Il changea d’habit et vint rejoindre son ami dans une salle où il l’attendait. Il s’informa de ses anciennes connaissances, et surtout de Dupuis et de Gallouin. Il apprit que Dupuis était toujours de ses amis, et que Gallouin était mort. Il est mort, interrompit-il avec précipitation ! Oui, répondit le conseiller, il est mort comme un saint, et d’un genre de mort qui vous étonnera, quand vous le saurez ; il y avait quatre ans qu’il était capucin. Comment, reprit encore Des Frans avec précipitation, Gallouin est mort capucin… Il voulait poursuivre lorsque le tailleur entra. Il se fit prendre la mesure, et lui laissa de l’argent pour lui faire un habit à la mode et riche pour le lendemain, et un autre à son valet, après quoi il sortit en disant au conseiller qu’il était au désespoir de le quitter si tôt ; car, ajouta-t-il, outre le plaisir que j’ai d’être avec vous, ce que vous m’avez dit de Gallouin me donne une envie de m’instruire de tout ce qui le regarde, que vous ne pouvez pas comprendre, parce que vous en ignorez le sujet, que je vous apprendrai moi-même. Si vous voyez Monsieur Dupuis avant moi, je vous conjure de me recommander à lui, et de l’assurer que je suis revenu son ami autant et plus que je n’étais parti. Des Ronais lui demanda quand il reviendrait ; il répondit que ce serait le plus tôt qu’il pourrait, et sortit.

Cependant Des Ronais qui était le plus intime ami de Dupuis, quoiqu’il fût brouillé avec sa cousine, le fit avertir de l’arrivée de Des Frans. Il vint à cette nouvelle, et ne le trouva pas, non plus que trois autres fois qu’il revint, parce que celui-ci ne retourna que le troisième jour. D’où revenez-vous donc depuis si longtemps, lui demanda Des Ronais, en l’embrassant sitôt qu’il le vit ? Je viens, répondit Des Frans, de voir une femme fidèle, et d’assister à son mariage, qui s’est fait la nuit même de mon arrivée. Comment donc, dit Des Ronais en riant, vous avez déjà trouvé des aventures, et il n’y a que deux jours que vous êtes ici ? Oui, reprit Des Frans en riant, et même de fort surprenantes. Je n’y ai pris au commencement que le seul intérêt de la curiosité, et ensuite un dessein effectif de rendre service à un fort honnête homme, si l’occasion s’en fût présentée. Je vous dirai une autre fois ce que c’est ; pour le présent, poursuivit-il, parlons d’autres affaires. Commencez par me dire comment vous avez passé le temps de mon absence, et apprenez-moi tout ce que vous savez de Gallouin. Je ne sais rien que le public ne sache, dit Des Ronais ; mais Dupuis qui doit venir ici vous en dira de nouvelles certaines, car ils n’ont jamais rien eu de secret l’un pour l’autre, et leur confidence a duré jusqu’à sa mort, qui est encore toute récente. Il est venu ici quatre fois pour vous voir ; je viens de l’envoyer avertir que vous êtes ici, et je ne doute pas qu’il ne vienne. J’aurais dû le prévenir, dit Des Frans ; mais cela étant, je l’attendrai, et j’apprendrai par lui ce que je veux savoir : mais je voudrais bien apprendre de vous-même, ce qui vous est arrivé en particulier. Vous m’avez dit que vous avez été sur le point de vous marier, et que cela n’a point réussi. Je voudrais bien en savoir la cause ; et si c’était un mariage d’amour, ou mariage d’intérêt, que vous avez manqué ? Vous le saurez quand il vous plaira, répondit le conseiller. Ce sera donc tout à l’heure, reprit Des Frans. Je n’aurais pas le temps de vous en instruire, dit Des Ronais, parce que Dupuis arrivera bientôt, et je ne veux pas parler devant lui de ma rupture avec sa cousine. Est-ce ma belle commère demanda Des Frans ? Oui, c’est elle, reprit-il, Dupuis n’en a point d’autre : c’est la plus infidèle fille qui soit au monde. Vous me surprenez, dit Des Frans, de l’accuser d’infidélité, elle dont on vantait tant autrefois la sincérité et la candeur. Elle a bien changé, reprit Des Ronais en soupirant, elle a soutenu son caractère de franchise si longtemps, que j’ai pensé en être la dupe ; mais enfin j’en ai été détrompé, dans le temps même que nous devions conclure ensemble, et c’est ce que je vous apprendrai sitôt que nous en aurons le loisir. Le tailleur qu’on avait envoyé quérir, et qui arriva dans le moment, les empêcha de poursuivre. Il habilla Des Frans d’un air de propreté, qui le remit dans sa bonne mine ordinaire.

Dupuis entra un moment après. Ils se firent l’un à l’autre toutes les caresses que deux parfaits amis peuvent se faire, après avoir été longtemps sans se voir. Ce n’était point de ces caresses feintes et étudiées que la corruption du siècle a introduites ; c’était un sincère et véritable épanchement de cœur. Des Ronais fit les honneurs de chez lui, ils se mirent à table, et s’entretinrent de leurs anciennes connaissances, et se rendirent compte en gros de tout ce qui leur était arrivé depuis leur séparation, attendant qu’un plus long loisir leur permît d’entrer dans un plus ample détail. Voilà, poursuivit Dupuis, l’état où nous en sommes, fort affligés de la mort funeste du pauvre religieux. Elle me touche, dit Des Frans, je n’étais pas son ennemi jusques au point de lui souhaiter un pareil malheur. Vous auriez eu tort de l’être, reprit Dupuis, il avait pour vous une véritable estime, et une sincère amitié ; l’injure qu’il vous a faite a été cause de sa retraite. Il ne m’avait point offensé, reprit Des Frans, fort embarrassé. Il connut pourtant bien ce qui en était, continua Dupuis : je suis plus informé de vos affaires que vous ne pensez, mais ne craignez rien, votre secret n’est su que de moi, et ne le sera jamais d’autre sans votre aveu. Je vous dirai ce qui en est, reprit Des Frans, lorsqu’il vous plaira de m’entendre. Je n’ai plus d’intérêt à rien cacher, et j’ai même promis à Monsieur Des Ronais de l’instruire de tout ; ainsi vous pouvez tout dire. Cela étant, reprit Dupuis, je m’expliquerai plus intelligiblement devant lui que je n’aurais fait. Je lui demande pardon d’avoir eu quelque chose de secret pour lui, mais lorsqu’il saura quel est ce secret, je suis sûr, qu’honnête homme comme il est, il conviendra que le vôtre était d’une nature à n’être jamais révélé sans votre consentement ; et ne voulant plus, dites-vous, le cacher à Monsieur Des Ronais, je vous assurerai devant lui, que Gallouin n’a pas cru vous offenser, puisqu’il ne savait point que le sacrement vous eût joints vous et Silvie ; et qu’elle ne vous a point fait d’injure volontaire, puisqu’elle a été forcée à ce qu’elle a fait par une puissance plus forte que la nature. Je ne m’étonne pas de ne vous voir pas demander de ses nouvelles, vous en savez de plus certaines que nous : cependant vous ne nous avez point empêchés de porter nos conjectures jusqu’à la vérité, par une lettre qu’elle lui écrivit environ six mois après son départ et le vôtre. Silvie a écrit à Gallouin, reprit Des Frans tout surpris ! Et vous dites que l’injure qu’elle m’a faite n’était pas volontaire ? Oui répondit Dupuis, elle lui a écrit ; mais que cette lettre ne vous fasse aucune peine, Gallouin s’est rendu capucin, et outre cela il est mort. Il ne peut plus vous donner d’ombrage, et la lettre dont je vous parle, est ce qui l’a tout à fait déterminé à la retraite. Silvie la lui écrivait de son convent, et lui mandait qu’elle avait pris ce parti, sans l’instruire du lieu. Quoi, interrompit encore Des Frans, joignant les deux mains, Silvie a encore été assez perfide pour écrire à Gallouin qu’elle était religieuse ! Il a été assez simple pour la croire, et pour l’imiter ! Il n’est rien de plus certain, dit Dupuis. Mais interrompit Des Ronais, parlant à Des Frans, quelle part avez-vous là-dedans, que vous me paraissez si ému ? Tout, répondit-il. C’est un mystère qui n’est point connu de vous, Monsieur, ajouta Dupuis. Mais vous, interrompit Des Frans, en s’adressant à lui-même, comment l’avez-vous approfondi ce mystère que je croyais ignoré de toute la terre ? Vous le saurez, reprit Dupuis, lorsque je vous raconterai ce qui m’est arrivé en mon particulier : cependant ne vous chagrinez point de cette lettre : elle est toute chrétienne, et d’une véritable religieuse qui ne songe qu’à son salut, et à celui de son prochain : je vous en ferai voir une copie que Gallouin m’a permis de faire. Mais dites-moi, en attendant, ce qu’elle est devenue, et où elle est. Elle est morte, répondit Des Frans. Ils sont donc morts tous deux, reprit tristement Dupuis, et peut-être tous deux de mort violente. Non, répondit Des Frans, la mort de Silvie a été naturelle. J’avoue, poursuivit-il, que ses austérités peuvent avoir usé sa vie ; mais du moins la fin n’en a point été avancée par aucun secours étranger. Vous avez raison, interrompit Des Ronais tout étonné, de dire que le mystère dont vous me parlez me passe. Je n’aurais jamais soupçonné que vous eussiez rien eu de commun avec Gallouin et Silvie ; ni que c’eût été pour elle, que vous vous fussiez battu avec lui. Ce sont eux pourtant, reprit Des Frans en soupirant, qui ont donné le mouvement à toutes les actions de ma vie, et qui m’ont fait regarder ma patrie comme mon enfer ? Je vous en informerai, lorsque le repos m’aura rendu une partie de la tranquillité qui m’est nécessaire. Je prendrai encore pour témoin Monsieur de Jussy, dont vous avez tant entendu parler. Est-il à Paris, demandèrent à la fois Des Ronais et Dupuis ? Oui, répondit Des Frans ; nous arrivâmes avant-hier ensemble. Il y a deux ans que nous ne nous sommes point quittés, et j’ai été à sa noce jusqu’à ce matin. Il a enfin épousé sa maîtresse la belle Babet Fenouil : il m’a conté une partie de son histoire, et j’ai vu le reste. Cela doit être curieux, reprit Dupuis. Cela l’est aussi, répondit Des Frans. Autre incident, dit Des Ronais en riant ; dès le même jour que vous arrivez, vous assistez à un mariage, et ce mariage se contracte par un homme qui est banni depuis plus de six ans, à cause de sa maîtresse ; par un homme que tout Paris croit mort depuis quatre ans, et qui retrouve sa maîtresse fidèle. Elle a dû l’être pour son honneur, reprit Dupuis. Je suis charmé de sa constance, ajoute Des Frans. Il est rare, reprit Des Ronais, d’en trouver parmi les femmes dans le siècle où nous vivons. Vous n’avez pas tant de sujet de vous plaindre de sa mauvaise foi que vous voulez le faire croire, lui répondit Dupuis. J’ai voulu cent fois vous désabuser, poursuivit-il ; mais vous êtes tellement prévenu que vous n’avez jamais voulu m’écouter, non plus que d’autres que moi ; peut-être écouterez-vous mieux Monsieur Des Frans ; et la première fois que nous serons seuls, ou qu’il se donnera la peine d’aller voir ma cousine, comme elle m’a chargé de l’en prier, on le priera de tâcher de vous faire entendre raison. Qu’y a-t-il donc, interrompit Des Frans, où je puisse rendre service à ma belle commère ? Il y a, reprit Dupuis, que Monsieur Des Ronais veut être brouillé avec elle sur l’équivoque d’une lettre. Ma cousine a fait honnêtement tout ce qu’elle a pu, et plus même qu’elle ne devait, pour le désabuser, plusieurs amis communs s’en sont mêlés ; mais tout aussi inutilement que moi : il veut être en colère malgré les gens, et ne veut croire que sa prévention. Ma cousine à qui j’ai dit que vous êtes arrivé, et que vous logez chez lui, vous supplie d’aller chez elle, elle croit que vous ne donnerez pas assez à la colère de son amant, pour lui refuser une visite. Non assurément, répondit Des Frans. Je sais mon devoir, et vous me faites tort de croire qu’il faille m’en avertir, j’irai dès demain. Vous apprendrez tout d’elle, poursuivit Dupuis : si je pouvais rester, je vous en instruirais en présence même de Mr. Des Ronais ; mais il faut que j’aille trouver Madame de Londé. Quelle est cette dame, demanda Des Frans ? C’est, répondit Des Ronais, la sœur de défunt Gallouin, et la maîtresse de Monsieur Dupuis, qui la doit épouser, et avec qui il devrait être déjà marié. C’est elle qu’on appelait Mademoiselle Nanette, et qui est à présent veuve de Monsieur de Londé, l’un des plus agréables et des plus honnêtes hommes qui aient jamais été au monde. Je la connais, reprit Des Frans ; allez, Monsieur, poursuivit-il, en s’adressant à Dupuis, la compagnie d’une maîtresse est toujours plus agréable que celle de ses amis. Je ne puis me dispenser de me rendre aujourd’hui près d’elle, dit Dupuis ; mais je vous promets de me rendre auprès de vous demain matin, et de ne vous point quitter ; pour à présent je vous prie d’excuser. Après ce compliment il sortit, et Des Frans et Des Ronais étant restés seuls, le premier pria son ami de lui tenir parole, et de lui raconter ce qui s’était passé entre sa maîtresse et lui. Il le fit en ces termes.