(1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 29 janvier. Le « vendredi » de Mlle Nérys. »
/ 283
(1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 29 janvier. Le « vendredi » de Mlle Nérys. »

29 janvier. Le « vendredi » de Mlle Nérys.

Images dansées ou bien encore costumes dansés : voilà la formule de la matinée donnée par Mlle Germaine Nérys et M. José de Zamora, danseur-costumier, à la Comédie des Champs-Élysées. Ce spectacle m’a fait songer à ces mémorables présentations de modèles sur la piste de l’Oasis, l’an passé, où d’adorables jeunes filles faisaient le tour du plateau en adaptant l’allure et la forme du mouvement à la coupe de leurs vêtements de ville ou de soirée. Or les costumes très somptueux arborés par Mlle Nérys entravaient plutôt les mouvements indiqués à l’artiste par le maître Clustine qu’ils ne les secondaient ou les « habillaient ». Cette lutte contre le costume récalcitrant absorbait fâcheusement la danseuse. Nous pouvons comprendre un homme de théâtre quand, comme Michel Larionoff, il s’évertue à circonscrire et à limiter volontairement le mouvement par l’usage du costume « rigide » ; encore ne le suivons-nous pas dans cette voie. Ici le résultat était fortuit ; non un parti pris mais une défaillance. Ainsi nous avons aimé le costume de l’infante Vélasquez vu à travers Poiret ; mais dès que le tableau vivant se décomposait, ce n’était plus que de la danse d’amateurs pastichant indifféremment l’Espagne et l’Inde, la bayadère et la gitane.

La même observation vaut pour l’« Icône » ; le peintre Jacovleff a réussi, en utilisant des tissus brochés et lamés, à relier le corps de la danseuse au cadre de l’image sainte. Aussi, malgré certains excès somptuaires qui d’ailleurs déparaient tout le spectacle, l’impression première fut littéralement saisissante. Pourquoi fallait-il qu’un comédien vînt geindre devant la Madone des vers de Maurice Rostand en ajoutant à chaque mot des syllabes supplémentaires ? Pour le faire taire — si nous avons bien compris — la figure bizantine esquisse un mouvement qui déplace les lignes, et c’en est fait de la belle ordonnance des plis drapés avec tant d’intelligence.

Néanmoins, ce fut là le point culminant de ce divertissement fastueux mais, n’est-ce pas : un peu vide.