(1667) Traité de la comédie et des spectacles « La tradition de l'Eglise sur la comédie et les spectacles. Les conciles » pp. 53-68
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(1667) Traité de la comédie et des spectacles « La tradition de l'Eglise sur la comédie et les spectacles. Les conciles » pp. 53-68

La tradition de l'Eglise sur la comédie et les spectaclesa

Les conciles

Avertissement

On doit remarquer trois choses dans la lecture des Canons des Conciles sur le sujet de la Comédie.

La première est la sévérité de l'Eglise contre les comédiens et contre ceux qui assistaient à ces Spectacles, et le grand soin qu'elle prend pour empêcher qu'on ne contraigne les Chrétiens à y assister, ou à en être les acteurs; ce qui nous doit faire voir qu'elle n'a pas regardé cela comme un crime médiocre.

La seconde est, que les Canons qui sont en général contre les spectacles sont aussi contre la Comédie, parce qu'ils comprennent tous les Spectacles, et que la Comédie en était un chez les anciens, et même le plus divertissant pour les honnêtes gens ; et qu'ainsi on ne peut pas dire que ces canons ne sont faits que contre les autres Spectacles. Car, si cela était vrai, l'Eglise y aurait fait quelque différence, en marquant à ses enfants quels sont les Spectacles qui leur sont permis, et quels sont ceux qui leur sont défendus. Et ce qui marque encore plus clairement que les canons qui sont contre les Spectacles en général comprennent aussi la Comédie, c'est qu'il y a des canons qui la condamnent en particulier, l'Eglise ayant soin d'expliquer en de certains temps plus expressément les choses qu'elle se contente d'ordonner aux Chrétiens seulement en général en d'autres rencontres.

La troisième chose qu'il faut remarquer, c'est que quoiqu'un Concile d'Afrique, tenu l'an 424 se soit contenté de demander aux empereurs qu'ils défendissent tous les Spectacles à de certains jours plus particulièrement destinés au culte de Dieu, et aux exercices de piété, cela ne signifie pas qu'il prétendît les approuver et les permettre les autres jours. La raison qui le porte à demander cette défense aux Empereurs en est une preuve manifeste; car il marque que c'est parce que ces spectacles étaient contraires aux commandements de Dieu. Mais comme en ce temps-là il y avait encore un très grand nombre de Païens sur lesquels l'Eglise n'avait point de juridiction, et que d'ailleurs l'attachement du peuple à ces spectacles était si grand, qu'il avait été presque impossible, même aux Empereurs de les abolir. L'Eglise, par une extrême prudence, se contente de faire trois choses. La première, de demander que par le respect qui était dû à la véritable Religion, qui était aussi dès ce temps-là la religion des Empereurs, les spectacles cessassent absolument lorsque l'Eglise était occupée à honorer Dieu, pendant les grandes solennités. La seconde, de demander que les Chrétiens ne fussent point contraints à être, ni les acteurs, ni les spectateurs de ces Jeux défendus. Et la dernière, de lancer ses foudres sur ceux d'entre ses enfants qui désobéiraient à ses ordres et à sa discipline; de sorte que bien loin de tirer aucune conclusion de ce Concile en faveur de la Comédie, c'est des résolutions de cette célèbre Assemblée que nous tirons de plus fortes armes pour la détruire.

CANON LXII.
Du Concile d'ELVIRE, tenu l'an 305.

Si des Comédiens veulent embrasser la Foi Chrétienne, Nous ordonnons qu'ils renoncent auparavant à leur exercice; et qu'ensuite ils y soient admis, de sorte qu'ils n'exercent plus leur premier métier. Que s'ils contreviennent à ce Décret, qu'ils soient chassés et retranchés de l'Eglise.

CANON LXVII.
Du même Concile.

Il faut défendre aux femmes, et aux filles fidèles, ou catéchumènes, d'épouser des Comédiens. Que s'il y en a qui en épousent, qu'elles soient excommuniées.

CANON V.
Du premier Concile d'ARLES, tenu l'an 314.

Quant aux Comédiens, Nous ordonnons qu'ils soient excommuniés tant qu'ils feront ce métier.

CANON II.
Du 3. Concile de CARTHAGE, tenu l'an 397.

Qu'il soit défendu à tous Laïques d'assister aux Spectacles: Car il a toujours été défendu aux Chrétiens d'aller aux lieux qui sont souillés par les blasphèmes; c'est à dire, selon l'interprétation de Zonare, il a toujours été défendu aux Chrétiens d'aller aux lieux où l'on ne fait que des actions désordonnées et honteuses; et où par conséquent les Chrétiens qui y sont présents, sont cause que le nom de Dieu est blasphémé par les Infidèles, voyant le mépris que les Chrétiens font de la tempérance et de l'honnêteté.

CANON LXXXVIII.
Du 4. Concile de CARTHAGE, tenu l'an 398.

Celui qui les jours de Fête, quitte l'Assemblée solennelle de l'Eglise pour aller aux Spectacles, qu'il soit excommunié.

CONCILE D'AFRIQUE, tenu l'an 424.

Canon 28. ou 61. selon le Code des Canons de l'Eglise d'Afrique.

Il faut demander aux très-pieux Empereurs Théodose et Valentinien, qu'ils défendent les Spectacles des Théâtres, et des autres Jeux les Dimanches et les autres Fêtes que la Religion Chrétienne solennise; principalement, parce que comme pendant l'Octave de Pâques, le Peuple se trouve au Cirque, au lieu d'aller à l'Eglise, si la représentation des Spectacles qu'on a accoutumé de donner au Peuple, se rencontre en ces saints Jours, on doit remettre ces Jeux à un autre temps.

Il faut encore représenter aux très-pieux Empereurs qu'on ne doit point contraindre les Chrétiens d'assister aux Spectacles, ou d'en être les acteurs; car il ne faut persécuter personne, pour l'obliger de faire des choses qui sont contraires aux Commandements de Dieu; mais on doit laisser chacun dans la liberté qu'il a reçue de Dieu pour en user comme il faut; surtout on doit considérer le danger où sont ceux qui sont du corps de ces personnes qui sont chargées du soin des Jeux publics, qu'on contraint par la terreur des peines, de se trouver aux Spectacles contre les Commandements de Dieu.

Les Empereurs Théodose, et Valentinien, ayant égard aux remontrances des Pères de ce Concile, publièrent cette Loi, qui est rapportée dans le Code de Théodose l'année suivante 425.

Nous défendons aux Peuples dans toutes les Villes de notre Empire les divertissements des Théâtres, et du Cirque le Dimanche, qui est le premier jour de la semaine, le jour de la Naissance de notre Sauveur Jésus-Christ, le jour de l'Epiphanie, les jours de Pasques, et de la Pentecôte, tant qu'on porte les habits blancs, qui par leur blancheur, comme par des rayons célestes figurent la nouvelle lumière qu'on reçoit au Baptême; Comme aussi les jours qu'on célèbre, avec grande raison la mémoire du martyre des Apôtres, qui sont les Maîtres de tous les Chrétiens; afin que les fidèles occupent tout leur cœur et tout leur esprit au service de Dieu, et que s'il y a encore des personnes qui suivent l'impiété des Juifs, ou l'erreur et la folie des Païens, ils reconnaissent que le temps des prières est bien différent du temps du divertissement, et des plaisirs, et afin que nul ne s'imagine qu'il est obligé d'assister aux Spectacles, ou de les représenter à notre honneur, par la vénération et le respect qu'il doit à la Majesté Impériale, sans avoir même égard au culte qu'on doit à Dieu, de peur de nous offenser en faisant paraître moins d'affection envers nous, qu'il n'avait accoutumé de faire; Nous voulons que tout le monde soit persuadé que le plus grand honneur que nous puissions recevoir des hommes, est que toute la terre rende à Dieu tout-puissant la soumission, et le service qui est dû à sa grandeur.

CONCILE D'AFRIQUE, tenu l'an 424.

Canon 30. ou 63. selon le Code des Canons de l'Eglise d'Afrique.

Il faut aussi supplier les Empereurs, que si quelqu'un des Acteurs des Jeux publics veut recevoir la grâce du Christianisme, et sortir de cet état d'infamieb où il était, que personne ne le puisse obliger, ni contraindre de reprendre son premier métier.

Les Pères de ce Concile demandent l'exécution d'une Loi que les Empereurs Valens, Gratien et Valentinien avoient envoyée à Herasius Proconsul d'Afrique, l'an 381 pour la publier. Si les filles qui sont de la race infâme des Comédiens refusent de monter sur le Théâtre, qu'on les y contraigne; si toutefois elles n'ont point encore fait profession de la Foi, et de la Loi de la très sainte et vénérable Religion des Chrétiens, pour la garder toujours inviolablement ; Nous ordonnons aussi, que les femmes à qui nous avons accordé par une grâce spéciale, de ne point exercer cet honteux métier, jouissent toute leur vie de cette exemption, sans qu'on les puisse contraindre de rentrer dans la Compagnie de Comédiens.

CANON CXXI
Du Code des Canons de l'Eglise d'Afrique.

Que les personnes infâmes, tels que sont les Comédiens, ne soient point reçues à former des accusations.

CANON XX.
Du 2. Concile D'ARLES, tenu l'an 452.

Quant aux Comédiens qui sont du nombre des Fidèles, Nous ordonnons qu'ils soient excommuniés tant qu'ils feront ce métier.

CANON LI.
Du sixième Concile général, tenu l'an 680.

Ce saint Concile général condamne ceux qu'on appelle Comédiens, et défend entièrement leurs Spectacles, comme aussi les Danses qui se font sur le Théâtre. Si quelqu'un par mépris de ce Décret, vient à commettre quelque crime de ceux qui y sont défendus; si c'est un Ecclésiastique, qu'il soit déposé; et si c'est un Laïque, qu'il soit excommunié.

Sur quoi Zonare fait cette réflexion, les règles de la discipline Evangélique, bien loin de permettre aux Fidèles de s'abandonner au relâchement et à la dissolution, elles les obligent à se conduire vertueusement, et sans reproche, pour répondre à la sainteté de la Religion dont ils font profession; c'est pourquoi le Décret de ce Canon défend, et interdit tout ce qui relâche l'esprit, et dissipe son attention par un divertissement inutile qui cause le ris dissolu, et des réjouissances immodestes.

CANON IX.
Du 3. Concile de CHALONS, tenu l'an 813.

Les Prêtres doivent s'éloigner de tous les objets qui ne font que charmer les oreilles, et surprendre les yeux par des apparences vaines, et pernicieuses, et ils ne doivent pas seulement rejeter et fuir les Comédiens, les Farces et les Jeux déshonnêtes; mais ils doivent encore représenter aux Fidèles, l'obligation qu'ils ont de les rejeter et de les fuir.

REGLEMENT DE SAINT CHARLES BORROMEE
Tiré du second Synode Diocésain de Milan, tenu l'an 1568.

Dans le Chapitre de la seconde Partie, où il traite de l'obligation des Prédicateurs à reprendre continuellement les pernicieuses coutumes, qui sont la source des péchés, et à persuader de les abolir.

Que les Prédicateurs reprennent continuellement les plaisirs qui portent au péché, auxquels les personnes qui suivent le dérèglement d'une coutume dépravée se laissent emporter si facilement; que les Prédicateurs s'efforcent de rendre ces choses odieuses; qu'ils représentent au peuple combien est grande l'offense et l'injure que Dieu en reçoit; que c'est de là que viennent tant de maux; que c'est ce qui cause les calamités et les misères publiques, et une infinité de malheurs.

Qu'ils représentent sans cesse combien les Spectacles, les Jeux, et les autres divertissements semblables, qui sont des restes du Paganisme sont contraires à la discipline Chrétienne; combien ils sont exécrables, et détestables; combien de maux et d'afflictions publiques ils attirent sur le Peuple chrétien; et pour en persuader leurs auditeurs, ils emploieront les raisons dont se servent ces grands Personnages, Tertullien, Saint Cyprien martyr, Salvien, et Saint Chrysostome, ils n'omettront rien sur ce sujet de ce qui peut contribuer à détruire entièrement ces dérèglements et ces débauches.

Ils prêcheront souvent avec force contre les Danses, et le Bal, par lequel sont excitées les passions les plus dangereuses: Enfin ils emploieront tous leurs soins à représenter avec un zèle pieux, et avec autant de véhémence, qu'il leur sera possible, combien les Comédies, qui sont la source et la base presque de tous les maux, et de tous les crimes, sont opposées aux devoirs de la discipline Chrétienne, et combien elles sont conformes aux dérèglements des Païens; et que comme elles sont une pure invention de la malice du Démon, le Peuple chrétien les doit entièrement abolir.

CONCILE DE BOURGES, tenu l'an 1584.
Tit. des Laïques.
CAN. 4.

Ce Concile exhorte tous les Chrétiens de se conduire de telle sorte, que leur vie réponde à la dignité, et à l'honneur du nom de Jésus-Christ, et de fuir autant qu'il leur sera possible, les Danses, les Jeux publics, les Comédies, les Masques et les Jeux de hasard.