(1825) Encore des comédiens et du clergé « DISCOURS PRELIMINAIRE. » pp. 13-48
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(1825) Encore des comédiens et du clergé « DISCOURS PRELIMINAIRE. » pp. 13-48

DISCOURS PRELIMINAIRE1.

Je crois devoir entretenir mes lecteurs, des motifs qui m’ont porté à placer dans le courant du présent écrit, ayant pour titre, (Encore des Comédiens et du Clergé), quelques réflexions morales, politiques et religieuses. Mon intention est de me rendre utile à la vraie religion, au roi, à son gouvernement, au peuple, et en particulier s’il est possible, à la cause qui va être agitée contre les deux journaux inculpés par le réquisitoire de M. le procureur-général Bellart.

La condamnation de ces deux journaux, me paraît très probable par la nature même de la loi de tendance qui va les juger. Tous les auteurs également succomberaient, si une pareille loi était dirigée contre eux, ainsi que je l’indiquerai dans le courant de cet écrit. Je puis donc publier encore sans risque mes réflexions à ce sujet, car il n’est pas un ouvrage, en matière de politique et de religion, publié dans le sens de l’opposition, qui ne puisse être attaqué correctionnellement ou criminellement à chaque page ou à chaque ligne.

Du reste mon but est en outre de tâcher de déjouer toutes les espèces d’hypocrisies, de jongleries ou de charlataneries littéraires, politiques et religieuses, sous telles couleurs qu’elles puissent se montrer. Ce n’est qu’en les démasquant qu’on pourra corriger les abus et les vices, qu’on rendra les hommes meilleurs, et qu’on parviendra à enchaîner l’inexorable intolérance politique et religieuse qui aime à s’abreuver de sang humain.

De tout temps, cette double intolérance s’est permis trop souvent, de commettre sans pitié, sans remords et en sûreté de conscience, sous le prétexte des intérêts de la religion et de ceux de l’état, des actes d’immoralité dans tous les genres, des injustices manifestes, des forfaits inouïs, des crimes et des atrocités religieuses, inquisitoriales et politiques, qui font frémir l’humanité.

Je ne veux pas parler de cette intolérance en matière de dogmes et de mystères révélés, que chaque religion est bien libre d’admettre : mais je désigne seulement l’intolérance fanatique, qui en abandonnant la morale se croit en droit d’exterminer dans ce bas monde quiconque se refuse à croire des mystères et des dogmes révélés.

Ce fatal principe d’intolérance fanatique et cruelle, que des gouvernements et des religions démoralisés, ont tant à cœur de maintenir, est faux, inhumain, antisocial, antichrétien, et ne peut exister et se maintenir, que par la violence, la terreur, le despotisme le plus arbitraire, et conduit à la tyrannie la plus odieuse.

Ceux-là qui adoptèrent et prêchèrent un tel principe, abusèrent des religions et s’en servirent comme d’un levier puissant, qu’ils mettaient en œuvre, avec d’autant plus de facilité, que les hommes ignorants sont portés naturellement vers la superstition. Les prêtres s’en servirent pour augmenter leur influence, leur crédit, leurs richesses et leur autorité sur terre. Ils travestirent la morale pure de l’évangile et ils y substituèrent une morale mondaine, une morale relâchée, qui ne fait consister la religion, que dans de simples pratiques, que dans des croyances symboliques et mystiques, qui dans les fausses religions, sont si fabuleuses et si ridicules. Cette morale factice, basée sur l’impitoyable intolérance religieuse, non seulement permet les crimes, mais encore elle ordonne de les commettre pour la gloire de Dieu, en les érigeant en vertus.

Tous les faux dévots et cette multitude d’esprits faibles ou irréfléchis, répètent sans cesse, d’après les déclamations des dogmatiseurs fanatiques dont ils se laissent séduire, que toutes les bonnes actions des hommes, que toutes leurs vertus, ne sont rien sans la foi, tandis que saint Paul, ce véritable apôtre de la morale chrétienne et évangélique la plus pure, a dit tout le contraire. Ecoutons-le, voici comme il s’exprime en parlant de la foi et de la charité :

« Si linguis hominum loquar, et angelorum, caritatem autem non habeam, factus sum velut æs sonans aut cymbalum tinniens. 

« Si habuero prophetiam et noverim mysteria omnia, et omnem scientiam ; et si ha buero omnem fidem ita ut montes transferam, caritatem autem non habuero, nihil sum.

« Caritas patiens est, benigna est ; caritas non æmulatur, non agit perperam, non inflatur.

« Non est ambitiosa, non quærit quæ sua sunt, non irritatur, non cogitat malum.

« Non gaudet super iniquitate, congaudet autem veritati.

« Omnia suffert, omnia credit, omnia sperat, omnia sustinet.

« Nunc autem manent, fides, spes, caritas, tria hæc ; majorum horum est caritas. » (Ep. prim. S. Pauli ad Corinth. Cap. xiii. Versic. 1, 2, 4, 5, 6, 7, 13.)

« Si je parle les langues des hommes et le langage des anges, et que je n’aie point la charité, je ne suis que comme un airain sonnant et une cymbale retentissante.

« Quand j’aurais le don de prophétie, que je pénétrerais tous les mystères, que j’aurais une parfaite science de toutes choses ;

« Quand j’aurais encore toute la foi possible, jusqu’a transporter les montagnes ; si je n’ai point la charité, je ne suis rien.

« La charité est patiente, elle est douce, elle est bienfaisante.

« La charité n’est point envieuse ; elle n’est point téméraire et précipitée ; elle ne s’enfle point d’orgueil.

« La charité n’est point ambitieuse, ne cherche point ses propres intérêts ; elle ne se pique point ; elle ne s’aigrit de rien ; elle n’a point de mauvais soupçons ; elle ne se réjouit point de l’injustice ; mais elle se réjouit de la vérité.

« La charité tolère tout ; elle croit tout ; elle espère tout ; elle souffre tout.

« Or ces trois vertus, la foi, l’espérance et la charité, demeurent ; mais la charité est la plus excellente des trois. » (Ep. de S. Paul aux Corinth., chap. xiii.)

La même morale est annoncée par les quatre évangélistes. Tous s’expriment ainsi : « Ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qui vous fût fait…. Celui qui aime Dieu doit aimer aussi son prochain…. Vous aimerez votre prochain comme vous-même…. Aimez vos ennemis…. Faites du bien à ceux qui vous haïssent… priez pour ceux qui vous calomnient…. Traitez les hommes de la même manière que vous voudriez qu’ils vous traitassent…. »

Ces différents passages se trouvent plus étendus dans Saint-Marc, chap. xii ; Saint-Jean, chap. iv ; Saint-Luc, chap. vi et xi, etc., etc.

Les saints évangélistes, ainsi que les pieux et vénérables personnages de la primitive église, ne cessèrent tous de prêcher la douceur, la charité, l’humilité, le pardon des injures, et le mépris des richesses.

Telle est, en abrégé, la morale évangélique, dont l’empreinte divine caractérise la véritable morale chrétienne.

Une foule de théologiens ont, au contraire, cherché à détruire cette morale éternelle que Dieu a créée au fond de nos cœurs. Ils ont fait tous leurs efforts pour l’étouffer sous le poids de leurs énormes traités, remplis d’ignorance, d’astuce, de subtilités et de mauvaise foi. Leur fausse dialectique y est perpétuellement en opposition avec le bon sens et la raison. Tous leurs écrits ont une empreinte de mysticité, qui donne à leur style un caractère particulier, auquel on ne peut se méprendre, et qui, rempli de superstition et de fanatisme, ne respire que menace et vengeance.

La morale chrétienne et évangélique est perpétuellement outragée par ces théologiens corrompus. On n’aperçoit dans leurs commentaires qu’une morale de convenance, dictée par l’égoïsme et adaptée aux intérêts d’un parti ambitieux et cruel, une morale enfin de circonstance, qui, au moyen d’une direction d’intention, érige le crime en vertu.

Ce n’est donc qu’en dégageant la vraie religion des épaisses ténèbres de l’ignorance, de la superstition et du fanatisme dont elle est obscurcie, qu’on pourrait la ramener à sa pureté primitive.

La sublime morale chrétienne et évangélique fut trop souvent foulée aux pieds par ceux-là même qui s’annonçaient pour la prêcher, par des prêtres hypocrites et prévaricateurs, devenus corrupteurs de la morale religieuse, de la morale politique et de la morale particulière.

Les gouvernements se sont en effet laissé corrompre par les prêtres, en adoptant l’immoralité politique, appelée aussi machiavélisme, comme un principe nécessaire pour gouverner.

L’autorité s’est abusée cruellement en perdant de vue que les souverains ne parviendront jamais à perfectionner l’art de bien gouverner, si ce n’est en faisant triompher la saine morale, et en instruisant les peuples pour les rendre plus heureux.

Les souverains devenus meilleurs en pratiquant eux-mêmes la morale, auront les yeux ouverts sur leurs véritables intérêts. Ils comprendront que l’alliance du gouvernement avec le sacerdoce est trop dangereuse et toujours a été la source inévitable de tous les maux qui ont troublé et troubleront à jamais la paix intérieure des Etats.

De tout temps les prêtres, dans leur intérêt, s’efforcèrent toujours de replonger les peuples dans les ténèbres de l’ignorance. Ils ne peuvent oublier que c’est dans les temps de barbarie qu’ils obtinrent le plus d’influence et qu’ils parvinrent le plus rapidement à s’emparer de grands biens, tandis qu’au contraire leur crédit diminue en raison du progrès des lumières et de la civilisation.

Telle est l’origine de l’aversion des fanatiques religieux contre le développement des sciences et le progrès des lumières de la saine philosophie. De là tant de diatribes et de vexations contre la méthode de l’enseignement mutuel, qui est si populaire et qui procure au peuple une instruction si facile et si peu coûteuse. De là ces conseils perfides, donnés aux souverains, de condamner les peuples à l’ignorance, sous prétexte de les rendre plus soumis à l’autorité publique et plus faciles à gouverner.

Vouloir arrêter le développement de la civilisation et les progrès des lumières pour ne fonder le pouvoir des princes que sur l’ignorance et l’abrutissement des peuples, est un conseil perfide, ainsi que je viens de le dire. Il équivaut à une déclaration hostile contre les droits de tous les peuples, et dont les conséquences attaquent les droits des souverains.

Les philosophes déjouèrent de tout temps les maximes détestables, l’ambition et les absurdités des prêtres des païens ; ils démasquèrent leurs jongleries, leurs charlataneries, étayées de prétendus miracles, dont les plus imposants n’étaient que des phénomènes de physiologie phantaziexoussique, qui, de nos temps, furent très improprement appelés du magnétisme animal. Peut-on méconnaître maintenant l’origine et les motifs de la haine implacable de quelques prêtres contre les philosophes anciens et modernes ?

Les prétendus défenseurs de la Divinité voulant établir leur puissance et leur autorité, se déclarèrent les cruels vengeurs de Dieu. Désespérant de jamais pouvoir subjuguer les philosophes, ils déposèrent toute honte en se déterminant à les accabler par les effets irrésistibles de la loi du plus fort. Ils comprimèrent les ennemis des idées absurdes par l’appareil de la terreur, et ils parvinrent enfin à s’en défaire au moyen de lois inquisitoriales qui leur procurèrent la jouissance d’assouvir leur haine par des exécutions sanguinaires et par des assassinats judiciaires. Leurs vengeances étaient d’autant plus faciles à obtenir, que des juges dévoués, entraînés par l’esprit de parti, dont les opinions sont connues d’avance, séduits d’ailleurs par les faveurs, ou contenus par les menaces, condamnaient souvent à regret la tendance et les mauvaises intentions qu’ils prêtaient aux prévenus. C’est par cette manière injuste de procéder que des juges choisis et investis d’un pouvoir discrétionnaire interprétaient à leur guise des lois d’exception, des lois véritablement inquisitoriales uniquement fondées sur leurs opinions, et faisaient taire les lois équitables dont ils ne devaient être que les interprètes et non les législateurs.

L’inclination générale des hommes pour le merveilleux, ainsi que leur irréflexion et la faiblesse de leur entendement, de tout temps donnèrent aux ministres des cultes religieux, l’espoir, flatteur pour leurs intérêts, de parvenir facilement, à subjuguer le commun des hommes et à effrayer les âmes faibles et les ignorants, en égarant leur raison, par les vaines terreurs de la superstition.

Qui ne connaît les manœuvres des prêtres, pour priver les hommes des bienfaits de l’instruction ? Ils savent que l’étude des sciences et le progrès des lumières de la philosophie, en éclairant les hommes, tendent évidemment à les désabuser sur les erreurs de tous les genres. Les prêtres sentent donc toute la nécessité de s’emparer de l’enseignement public, pour en modérer le développement à leur gré et pour en proscrire les lumières philosophiques. Ils parviennent par ce moyen, à diminuer le nombre des philosophes inaccessibles aux sots préjugés, et qui refusant de se soumettre au-joug honteux de la superstition, seraient plutôt disposés à en dévoiler les absurdités, à en démasquer les jongleries et à déjouer les cruautés du fanatisme sanguinaire.

C’est par de telles raisons que la société des jésuites veut à tout prix se charger d’instruire les hommes, non pour les éclairer, mais pour les tromper, sans les rendre meilleurs, et enfin pour les démoraliser.

En se chargeant exclusivement de l’éducation de la jeunesse, la secte jésuitique a pour principe de refuser la connaissance des sciences à la classe du peuple ; mais quant à celle des gens riches, appelés à jouer un rôle dans la société, elle ne consent à lui communiquer les sciences qu’à regret, et s’applique principalement à former des imbéciles, ou des fanatiques qui ressembleront à leurs maîtres. Leurs élèves trop dociles, lorsqu’ils sont bien imbus de faux principes et de doctrines détestables, deviennent également les ennemis déclarés des sciences, et à l’exemple de leurs instituteurs, ils ne veulent pas que les hommes s’éclairent, et condamnent les peuples à l’ignorance : A peine sortis des bancs, ils refusent eux-mêmes, de s’instruire d’une manière plus approfondie ; leur âme abâtardie s’accoutume à ne plus faire usage de la raison et à ne plus avoir une conscience qui leur soit propre ; ils sont soumis à l’erreur et au mensonge. Ils semblent redouter de connaître la vérité ; ils brûlent les livres des philosophes, qu’ils condamnent sur des ouï-dire, car souvent ils ne les ont pas lus, et ne veulent pas les lire, on leur en fait un cas de conscience. Tout livre mis à l’index religieux et politique, est condamné au pilon. N’est-ce pas là la meilleure manière de triompher des arguments irrésistibles auxquels il n’y a pas de réponse ?

La plupart de ceux qui sortent des collèges jésuitiques, lorsqu’ils entrent dans le monde et qu’ils y occupent des postes importants, ne veulent pas que des subordonnés raisonnent, et leur permettant de s’abandonner à la morale des intérêts, ce n’est qu’à cette condition qu’ils leur accordent une orgueilleuse protection. Des chefs si impérieux, sont intolérants en religion comme en politique. Ils sont démoralisés par principe ; ils se persuadent que tous les crimes du machiavélisme sont des vertus et se croient en droit de les commettre sans remords, toutes les fois qu’ils les croient nécessaires à la gloire de Dieu et à celle de l’Etat.

Tel est le portrait fidèle, mais trop abrégé, d’une grande partie des élèves des jésuites, de ces hommes imbus des doctrines du fanatisme religieux, de ces hommes qui composent la faction servile, ennemie acharnée de l’instruction et des lumières de la philosophie.

Les mauvais prêtres n’ignorent donc pas que la servitude et le manque d’instruction avilissent les hommes, abrutissent les peuples et les rendent tous malheureux : tandis qu’au contraire, la science, la raison, le bon sens et la liberté tempérée par les lois, corrigent nécessairement la nature humaine et rendent meilleures et plus heureuses toutes les classes de la société.

Les ministres des anciens cultes religieux, savaient bien aussi que plus les hommes sont instruits de leurs devoirs et de leurs droits légitimes, plus ils sont civilisés, plus ils sont éclairés, et moins ils sont susceptibles d’être dupés et rançonnés, moins il est facile de soumettre leur esprit aux croyances absurdes de la superstition, si contraires au bon sens et à la raison.

Les prêtres des anciennes religions firent en conséquence tous leurs efforts pour égarer et fatiguer l’esprit humain, par les idées théologiques les plus incohérentes, les plus inconcevables ; par des fables ridicules, par des mystères absurdes et inexplicables. Mettant le comble à la perversité, ils virent qu’il était de leur intérêt de corrompre le cœur humain au moyen de maximes pernicieuses, entièrement opposées aux préceptes de la morale la plus pure. Ils ne parvinrent que trop souvent à asservir l’humanité, et à l’abrutir au point de lui faire méconnaître les droits de la raison et étouffer en lui les inspirations divines du simple bon sens.

On conçoit difficilement le succès de ces maîtres fourbes, et pourquoi dans les temps anciens, ainsi que les casuistes relâchés que la société de Jésus a vomis dans des temps plus modernes, ils réussirent à faire goûter si rapidement aux mondains, la morale la plus corrompue. Il sera aisé de le comprendre, si on réfléchit que cette faction religieuse ancienne et moderne, s’est toujours appliquée à étudier le cœur humain, à en connaître les défauts et les vices, et à flatter ses inclinations perverses. Aux uns, ils leur enseignent à s’emparer du pouvoir absolu et à se faire obéir par la terreur et la force ; aux autres, ils leur apprennent la manière d’acquérir ou d’extorquer les richesses du peuple par la ruse, par la force et par des crimes, mais toujours sous la condition du partage des dépouilles entre l’autorité spirituelle et l’autorité temporelle. C’est cet heureux accord d’intérêts qui a toujours produit cet ascendant inconcevable dont les prêtres abusèrent en tout temps.

Il a donc toujours été de l’intérêt des séducteurs et de leurs complices, de condamner les hommes à l’ignorance et à l’abrutissement.

Ils n’aspirent qu’à en faire de vraies machines essentiellement obéissantes, et les prêtres se réservent à eux seuls le droit d’en régler les croyances religieuses. C’est ainsi qu’en traitant les peuples en esclaves, ils leur imprimaient également le caractère et les vices de l’esclavage.

Une maxime aussi blâmable, celle d’abrutir l’homme par l’ignorance, et tâcher de l’avilir, jusqu’à le rendre insensible au mépris et aux mauvais traitements, n’est-elle pas criminelle en politique comme en morale ? En méprisant le peuple, n’est-ce pas consentir à ne jamais s’en faire aimer ? Le souverain qui adopterait de pareils principes n’obtiendrait jamais l’affection de ses sujets, et n’y trouverait ni gloire, ni sûreté. L’amour des peuples envers leur souverain est cependant la garde la plus fidèle du prince. Il ne suffit pas de régner par la force, il faut encore gagner les cœurs par la clémence et la douceur.

Non seulement le fanatisme de tout temps montra une opposition marquée à l’enseignement des sciences, aux progrès de la civilisation ; mais il s’est encore efforcé de proclamer comme un axiome qui aujourd’hui en impose à beaucoup d’honnêtes gens, et qui consiste à dire : Que l’ignorance est le partage nécessaire du peuple… qu’il est dangereux pour l’état et pour la religion de lui accorder une instruction approfondie… et que moins il est éclairé, plus il est aisé de le gouverner.

Cette proposition exigerait une discussion dans laquelle je ne crois pas devoir entrer présentement. Je parviendrais bien certainement à en démontrer la fausseté et l’injustice, et, pour y parvenir plus sûrement, je diviserais la question, et j’en séparerais ce qui est de droit, d’avec ce qui est de fait.

Quoi qu’il en soit de cette proposition, les prêtres l’ont proclamée uniquement dans leur intérêt. Si elle offre un sens spécieux, c’est-à-dire qui ait, dans quelques-unes de ses parties, une apparence de vérité, ce sens spécieux, ne pourrait être invoqué qu’en faveur des gouvernements démoralisés qui se sont placés dans la cruelle nécessité de ne pouvoir gouverner leurs sujets opprimés, que par la crainte et la terreur.

En effet, tout gouvernement qui arbore le pouvoir absolu, qui l’exerce despotiquement et tyranniquement en commettant sans remords et sans honte des vexations et des injustices manifestes, qui surcharge le peuple d’impôts exorbitants, pour les dissiper en prodigalités, pour assouvir en vain l’insatiable avidité des agents stipendiés, des complices trop nombreux de la tyrannie ; ce gouvernement, dis-je, se place irrésistiblement dans la dure nécessité de recourir à la violence, à la terreur, à des mesures de rigueur pour comprimer le mécontentement qu’il a lui-même excité. C’est le gouvernement lui-même qui est en quelque sorte l’artisan du désordre qu’il fait naître ; il est le créateur des dangers auxquels il s’expose en violant les droits légitimes de chaque particulier. C’est en excitant le mécontentement général que l’autorité répand elle-même parmi le peuple les semences de la révolte, dont à chaque instant elle peut craindre les funestes effets. Un pareil gouvernement, par sa démoralisation, se trouve placé sur un volcan enflammé. Il en attise lui-même le feu en ne cessant d’aigrir les esprits qu’il a déjà irrités.

Ce n’est pas l’ignorance et l’abrutissement des nations qui auraient pu diminuer les guerres, les rébellions et les révolutions sans nombre, qui ont eu lieu dans les siècles de barbarie. Pourquoi donc condamner le peuple à l’ignorance ? pourquoi l’exposer à tous les malheurs qui menacent les êtres imprévoyants, auxquels il est plus facile d’en imposer, et qui par conséquent se laissent plus aisément duper et spolier ?

De quel droit ceux-là qui condamnent le peuple à l’ignorance, voudraient-ils qu’une portion de la population qui constitue un état fût plus malheureuse que l’autre portion ? Un arrêt aussi injuste n’a pu être dicté que par l’égoïsme sacerdotal, et par le machiavélisme politique.

On ne prétend pas dire qu’il faille exciter le peuple à se livrer malgré lui à l’étude des sciences ; mais il faut lui laisser la liberté de s’instruire, lui en faciliter les moyens plutôt que d’y mettre des entraves, et de pousser la petitesse jusqu’à persécuter cette précieuse et utile méthode de l’enseignement mutuel, que les aveugles partisans des jacobinières de Montrouge et de Saint-Acheul a, persécutent pour plaire à la puissance jésuitique.

La science est un bien commun qui appartient à tous les citoyens ; chacun a droit d’y prétendre selon les circonstances dans lesquelles il se trouve : mais l’ignorance est un mal, le mal ne peut produire que du mal, et tous les raisonnements contraires aux principes de philanthropie ne sont que des paradoxes. Je le répète donc, il est injuste de condamner le peuple à l’ignorance : cette injustice est une mauvaise action, qui, dans aucune hypothèse, ne peut faire le bonheur de la société, ni devenir un bienfait politique, et encore moins servir de moyen pour mieux gouverner.

Telle est l’origine de l’aversion des jésuites et de ceux de leurs élèves qui sont fortement imbus de principes jésuitiques contre le développement des sciences, tels sont leurs motifs pour s’opposer aux progrès des lumières philosophiques et dévouer aux flammes les écrits de Voltaire, de Rousseau et de tant d’autres illustres et savants auteurs. Telles sont les raisons qui leur font adopter des opinions aussi injustes. C’est ainsi que tous les prêtres, dans l’antiquité, faisaient également tous leurs efforts pour avilir et abrutir les peuples, pour les empêcher de s’éclairer sur leurs devoirs et leurs droits et pour les dépouiller plus facilement.

Il serait utile sans doute d’indiquer l’origine de l’autorité occulte que des prêtres exercèrent dans tous les temps sur les souverains, sur les gouvernements et sur les peuples. Mon intention n’est pas de me livrer à une longue discussion sur ce sujet. Elle me conduirait trop loin ; mais je me contenterai de présenter en passant quelques réflexions sur cette matière si difficile à traiter avec clarté.

Je répéterai d’abord qu’on doit être maintenant bien convaincu, que le désir d’acquérir des richesses fut toujours, dès la plus haute antiquité, le principal mobile des actions de tous les ministres des cultes religieux ; il fut le motif et la base fondamentale de leur doctrine, de leurs dogmes et de leurs intrigues ambitieuses.

C’est pour seconder leurs intérêts qu’ils immolèrent sur les autels de Plutus, de ce dieu des richesses, et la morale et la justice ; c’est dans ce but qu’ils trahirent et qu’ils sacrifièrent sans remords l’humanité et la bonne foi qu’ils foulèrent indignement à leurs pieds. Ils propagèrent enfin de toutes parts l’immoralité religieuse, l’immoralité politique, et l’immoralité particulière.

Pour réussir dans leurs projets ambitieux, les prêtres sentirent que non seulement ils devaient s’entourer de respect et de crédit, mais encore obtenir une grande influence sur les esprits : c’est par cette raison que dans l’origine, n’ayant aucune autorité par eux-mêmes, ils s’appliquèrent à exercer une puissance morale sur les souverains, sur les gouvernements et sur les peuples.

Les disciples de Loyola particulièrement, et dans les temps modernes, poussèrent à un haut degré cette puissance morale en s’emparant de l’éducation de la jeunesse, en dirigeant celle des princes et en s’arrogeant le droit de donner pour ainsi dire exclusivement des confesseurs aux rois. Tous les courtisans, pour plaire à leur maître, confiaient également la direction de leur conscience à des jésuites.

La faction religieuse, dès la plus haute antiquité, joua toujours le premier rôle en se rendant dépositaire des sciences humaines, les prêtres s’en servirent pour abuser de la stupidité du vulgaire ignorant et crédule. Mais ils apprirent encore que pour maîtriser les esprits les plus revêches et pour en imposer généralement, il fallait étonner, effrayer et inspirer de la terreur ; ils eurent donc recours aux impostures superstitieuses et aux barbaries du fanatisme qu’ils exercèrent tantôt par eux-mêmes, témoin les tortures et les bûchers de l’inquisition, et tantôt en employant une telle influence sur les gouvernements, que ceux-ci obéissaient à la voix des prêtres, et devenaient les exécuteurs des vengeances sacerdotales. Ils sentirent encore qu’il leur était nécessaire de représenter aux hommes la divinité sous un aspect terrible. Ils se décidèrent en conséquence, et malgré les réclamations du bon sens et de la raison, à proclamer l’existence idéale d’un Dieu véritablement formé à leur image, c’est-à-dire d’un dieu jaloux, exigeant, vengeur, irascible et cruel, d’un Dieu inexorable enfin lorsqu’il est offensé, mais qu’on pouvait cependant très facilement fléchir par la soumission aux ministres du culte et surtout par des présents et des victimes.

On pouvait donc, au moyen de l’intercession des prêtres, apaiser un dieu si effrayant, et se le rendre propice en raison de la richesse des offrandes qu’on déposait sur les autels et dans les temples.

A ce hideux tableau de la Divinité chez les païens, qui ne reconnaît le portrait des prêtres eux-mêmes ? Ils se sont ainsi dépeints d’après nature, et ils ont donné en même temps une idée du caractère qui les distingue et de la morale corrompue qu’ils prêchent et qu’ils ont observée avec tant de persévérance depuis que le monde existe, dans toutes les religions et malheureusement sans en excepter aucune.

Je n’ai fait cette dernière remarque que pour exciter la surveillance des gouvernements contre les vices, l’immoralité et les exorbitantes prétentions de nos prêtres, et non pour nuire à la vraie religion et offenser ceux qui la professent.

Nous pourrions développer cette dissertation et entrer dans de plus grands détails sur cette matière que je n’ai fait qu’effleurer. Je voudrais faire connaître l’origine de l’intolérance et du fanatisme qui dérive du système adopté par les prêtres sur l’origine du bon et du mauvais génie. Je donnerais aussi des notions plus étendues sur les causes qui ont produit l’immoralité religieuse, politique et particulière ; mais je ne puis, quant à présent, m’étendre au-delà des bornes que je me suis prescrites dans ce discours préliminaire. Peut-être un jour je traiterai ce sujet d’une manière plus complète, si toutefois l’influence du jésuitisme ne s’y oppose.

Je regrette donc de terminer cette dissertation après l’avoir à peine ébauchée ; mais du moins qu’il me soit permis de répéter encore, que vouloir arrêter le développement de la civilisation et le progrès des sciences, pour ne fonder le pouvoir des princes que sur l’ignorance du peuple et sur la superstition et le fanatisme, est un conseil perfide, inspiré par le jésuitisme et essentiellement nuisible à tous les gouvernements et à tous les souverains. Ce conseil équivaut en quelque sorte à une déclaration hostile, faite contre la liberté et contre les droits les plus légitimes des peuples.

L’autorité temporelle ne doit plus se laisser abuser, par ceux qui furent de tout temps et seront toujours, invinciblement, tantôt ouvertement et le plus souvent secrètement, avec hypocrisie, les ennemis jurés de toute autorité qui leur résiste, et les rivaux constants de la royauté. Toujours ils seront les adversaires irréconciliables des rois, auxquels ils n’accorderont des instants de paix qu’autant qu’ils les auront subjugués, avilis et rançonnés.

Les souverains et les gouvernements doivent donc refuser leur confiance à de pareils conseillers, à des êtres qui enseignent que le crime est permis dans l’intérêt de la religion, à des prêtres hypocrites pour lesquels la perfidie est une action vertueuse et qui en trompant les hommes prétendent servir le ciel.

Comment pourrait-on en effet se fier à ceux, qui sont profondément corrompus et démoralisés en religion comme en politique, à des sectaires qui propagent par système dans toutes les classes de la société, l’immoralité religieuse, l’immoralité politique et la corruption des mœurs ?

Défiez-vous donc de cette secte anarchique des disciples de saint Ignace de Loyola, qui ne rêvent que l’inquisition et qui donnent aux souverains le conseil nuisible d’exercer le pouvoir arbitraire et absolu, qui porte en lui-même le germe de sa propre destruction. Ce pouvoir sans bornes a une tendance invincible vers l’immoralité politique et conduit infailliblement à cette corruption qui est la source des abus, des désordres et de l’anarchie. Ce pouvoir si dangereux fait également le malheur de ceux qui y sont soumis et de ceux qui veulent l’exercer. Cette vérité incontestable est appuyée de faits innombrables qui abondent dans l’histoire ancienne et moderne des peuples et dont aujourd’hui la malheureuse Espagne nous offre les preuves les plus tristes.

Le salut des états, la sûreté des souverains, et le bonheur des peuples, résident dans la justice qui protège également le faible, et le pauvre comme le riche. La douceur paternelle, et la bonté, qui devraient toujours caractériser, non seulement les princes, mais même leurs agents, enchaînent les cœurs et commandent l’affection des sujets, tandis que les injustices, les mauvais traitements et les vengeances éternisent les haines. L’orgueil, la tyrannie, le brigandage et les dilapidations de ceux qui exercent le pouvoir au nom du souverain, irritent ceux qui doivent obéir et payer. Tôt ou tard de pareils abus produisent des désordres et amènent insensiblement les révolutions. C’est ainsi qu’aujourd’hui l’Amérique et la Grèce ont été forcées comme malgré elles, de secouer le joug de leurs oppresseurs, qui à force d’injustices et de cruautés ont anéanti eux-mêmes la légitimité de leur autorité.

Il est temps de repousser les principes dangereux de ces hypocrites incorrigibles, qui cachent leurs projets ambitieux, sous le masque de la religion ; et auxquels il ne manque que le pouvoir, pour renouveler les horreurs de l’abominable inquisition religieuse et rappeler la torture et les bûchers.

Il est temps que tous les gouvernements aient en horreur, les guerres à la fois politiques et religieuses, dont le caractère fut toujours celui de l’extermination ; et qui inspirées par la superstition et le fanatisme, furent constamment le signal du carnage et de la dévastation.

Il est temps que les souverains pour leurs propres intérêts, prêchent d’exemple par une conduite franche et loyale, et surtout morale en politique dans leurs transactions diplomatiques, comme dans leurs opérations administratives, tant au dehors, vis-à-vis des autres états, que dans l’intérieur vis-à-vis de leurs propres sujets.

Il est temps que les ministres d’état et tous les agents de l’autorité souveraine, pratiquent eux-mêmes la morale évangélique, cette sublime morale basée sur l’équité. C’est le seul moyen de rétablir la morale publique, car l’immoralité particulière ne fait des progrès parmi le peuple, qu’en raison de la corruption des gouvernements. Il faut donc ne plus écouter les conseils perfides du jésuitisme, il faut donc renoncer à solliciter des lois inquisitoriales toujours odieuses et toujours basées sur un principe d’injustice. Il faut s’abstenir de toutes ces mesures arbitraires, et quelquefois tyranniques. Il ne faut plus de destitutions, d’épurations, de purifications, et de circulaires destructives du droit d’élection et qui souvent ayant un caractère d’intrigue et de petitesse décèlent le jésuitisme qui ordonne et exige de pareilles mesures, indignes d’une autorité indépendante et qui ne devrait jamais s’abaisser devant aucun parti.

Il est temps que les tribunaux se persuadent que ce n’est point un cri séditieux que de s’adresser aux gouvernements eux-mêmes avec une confiance filiale, pour leur faire connaître les abus qui rongent et détruisent sourdement, et quelquefois ouvertement et avec impudeur, l’autorité souveraine ; que ce n’est point un crime d’invoquer paisiblement les droits naturels des peuples, et l’observation des lois de la part des agents de l’autorité publique ; que ce n’est point dans l’intention de nuire à la religion, ni de provoquer la haine contre les ministres du culte, que de faire connaître l’immoralité et le fanatisme des mauvais prêtres.

Il est temps que le souverain pontife, dont les vertus chrétiennes et évangéliques inspirent la confiance et la vénération à tous les vrais fidèles, se charge lui-même de faire rentrer dans leur devoir le clergé séculier et régulier. Il est temps de réformer les mœurs, le langage et les principes des prêtres fanatiques qui, en divers pays, et principalement en Espagne et en Portugal, nuisent aujourd’hui à la religion chrétienne, apostolique et romaine.

Depuis que la cruelle superstition exerce ses ravages dans la malheureuse péninsule, depuis que la faction du monachisme et du jésuitisme, ultramontaine malgré le saint-siège, y verse de toutes parts à grands flots le sang humain et y excite les passions les plus haineuses ; depuis qu’elle y fanatise le peuple abruti par l’ignorance, on n’y a pas encore entendu la voix du père des chrétiens, nulle pastorale apostolique, n’y a encore été proclamée, d’accord avec l’autorité souveraine séculière, pour apaiser les fureurs, ramener les esprits à l’autorité légitime, et instruire les hommes sur leurs devoirs de chrétiens et de sujets soumis.

Il est temps que le chef de l’église rompe un silence si nuisible qui semblerait l’accuser de donner son approbation, à la rébellion et à l’anarchie.

Il est temps qu’il proclame les principes qu’il professe lui-même, sur la ligne de démarcation qui doit exister entre l’autorité spirituelle et l’autorité temporelle. Il est temps qu’il fasse connaître à tous les souverains de l’Europe, qu’il se désiste loyalement des prétentions exorbitantes de ses prédécesseurs. Il est temps qu’il déclare franchement qu’il n’a aucune autorité directe sur la puissance terrestre des souverains dans ce bas monde, et que c’est à tort qu’on voudrait l’accuser de prétendre avoir le droit de disposer de la vie, et de la couronne des princes.

Cette déclaration franche, loyale, faite avec une humilité chrétienne, fondée sur la justice, fondée sur l’évangile, fondée enfin sur les divins préceptes de Jésus-Christ, qui a dit formellement mon royaume n’est pas de ce monde, ramènerait infailliblement et en très peu de temps à la communion de l’église romaine, toutes les puissances qui ne s’en sont séparées que par l’effroi que leur ont causé les prétentions et la corruption du clergé catholique. Les théologiens qui, jusqu’à présent, ont voulu traiter cette question de la réunion des schismatiques à l’église de Rome, pour la plupart soumis à l’empire des préjugés, n’ont jamais bien envisagé cette question difficile dans son véritable point de vue ; ils n’ont présenté que des raisonnements faibles ou sans justesse, qui toujours ont été, et seront toujours sans effet. Que le saint père se souvienne que ce furent les excès et la corruption du clergé, ainsi que la torture et les bûchers de l’horrible inquisition, qui produisirent ces grands schismes, et firent perdre à la cour de Rome près de la moitié de l’Europe. Les jésuites, véritablement anti-chrétiens, vinrent ensuite avec l’intention formelle de remplacer l’inquisition. Ils en héritèrent les mêmes principes, et se rendirent coupables des mêmes excès et des mêmes atrocités. Les résultats de leur affreuse mission seront les mêmes inévitablement, et s’ils ne sont arrêtés dans la carrière infâme que les disciples de Loyola parcourent avec tant de persévérance et d’obstination, bientôt le saint-siège verra l’autre moitié de l’Europe se séparer de sa communion.

Que le pape chasse les jésuites qui n’offrent qu’une société dangereuse, ou plutôt une secte désorganisatrice qui n’est en harmonie avec aucune autorité sur terre, pas même avec celle du chef de l’église, auquel plus d’une fois elle fit la loi, et dont les éléments tendent à la dissolution de tout ce qui lui résiste, et de tout ce qui lui est contraire. Que sa sainteté, surtout, proscrive le jésuitisme qui enseigne la manière de commettre toute espèce de crimes sans remords, et qui autorise le régicide pour la gloire de Dieu, et dans l’intérêt de la religion. Le chef des chrétiens sera alors bien certain de rendre la paix à l’église, d’apaiser les désordres qui désolent les gouvernements, et fera le bonheur des souverains et des peuples.

Il est temps enfin que tous les hommes, princes et sujets, ainsi que les ecclésiastiques dans tous leurs grades hiérarchiques, connaissent leurs devoirs et leurs droits légitimes. Les lumières ne peuvent que les rendre meilleurs, et les empêcher de tromper les hommes ou d’être la dupe de leur crédulité. L’instruction et la science doivent donc diminuer la masse des maux qui affligent l’humanité.