(1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre VI. Du Cardinal Mazarin. » pp. 89-108
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(1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre VI. Du Cardinal Mazarin. » pp. 89-108

Chapitre VI.
Du Cardinal Mazarin.

Mazarin se piquait d’être Poète. Il est vrai que ce n’était pas, comme Richelieu, jusqu’à l’honneur du cothurne ; il se vantait seulement d’avoir fait beaucoup de vers galants qui avaient réussi : mérite dont un Prélat, sans faire tort à sa gloire, eût pu ne pas se décorer. C’est ce qui fit la fortune de Benserade. Un jour qu’au coucher du Roi le Cardinal parlait de ses couronnes poétiques, il ajouta qu’il avait fait comme Benserade. Celui-ci, dont la fortune était alors fort délabrée, ayant appris peu de temps après ce mot flatteur, courut aussitôt à l’appartement du Cardinal, qu’il trouva couché. Il entre, malgré ses gens, pénètre jusqu’à lui, et se jette à genoux au chevet de son lit, lui fait les plus grands éloges de ses vers Italiens, qu’il n’avait jamais vus, et qu’il n’aurait pas entendusk, et lui témoigne de la manière la plus vive la joie et la reconnaissance de l’honneur infini qu’il lui avait voulu faire en daignant se comparer à lui. L’Eminence, à demi endormie, se réveille, rit de cette saillie et lui en sait bon gré, lui envoya le lendemain deux mille livres, et lui donna plusieurs pensions sur des bénéfices, revenu qui certainement ne fut jamais destiné à payer des vers galants. Mazarin se piquait encore de goût et de magnificence, et quoique bien inférieur en génie et en noblesse de sentiments à Richelieu, son prédécesseur, il crut devoir l’imiter dans son amour pour les spectacles.

Il fit plus, il établit en France une nouvelle espèce de spectacle jusqu’alors inconnu, l’Opéra. C’est le seul établissement qu’il ait fait pendant sa vie : Le Collège des quatre Nations ne fut projeté que dans son testament, et exécuté qu’après sa mort. On avait vu avant lui, il avait lui-même donné des bals, ballets, mascarades, etc. où l’on dansait, chantait, récitait des vers ; Benserade en avait fait un grand nombre. Mais une pièce dramatique régulière, partagée en scènes et en actes, formant un dessein, un nœud, un dénouement, accompagnée de chant, de danses, de machines, où l’on ne parle qu’en chantant, où l’on ne marche qu’en dansant, un spectacle où tout est réuni pour flatter le cœur, l’esprit, les yeux, les oreilles, que l’histoire de l’Opéra appelle « le spectacle universel, le triomphe de l’esprit humain, le grand œuvre par excellence », et qui en effet bien mieux que celui des Chimistes, fait couler des fleuves d’or dans la main des Acteurs, et une pluie d’or dans le sein des Danaé qui habitent ce pays des Fées ; on ne le connaissait qu’en Italie, il avait été ébauché en faveur de la maison de Médicis, à qui on doit en Europe la naissance des arts et du luxe. Il brillait depuis vingt ans à Venise, lorsqu’en 1645 il plut au Cardinal de lui faire passer les monts et l’établir parmi nous, où il s’est répandu et perpétué avec le plus grand éclat, au grand préjudice des bonnes mœurs. La Gazette littéraire de France (7. mars 1764.) s’est avisée, à propos de rien, d’en faire l’apologie, et d’une manière fort maladroite : « On ne conçoit pas, dit-elle, comment il se trouve des esprits assez chagrins pour désirer l’anéantissement de l’opéra, où tous les arts imitateurs se réunissent et se combinent pour s’emparer de l’âme par tous les sens. » Le Journal de Trévoux, qui annonce cette Gazette (avril 1764), en rapportant cet endroit, ajoute avec vérité : « On pourrait répondre sans chagrin, que la raison donnée en faveur de l’opéra est peut-être la meilleure qu’on puisse fournir pour son anéantissement. » Qu’y a-t-il en effet de plus dangereux et de plus mauvais que ce qui s’empare de l’âme par tous les sens ?

Que la scène du monde est singulièrement contrastée ! dans le même temps un homme d’un caractère bien différent (S. Vincent de Paul) bâtissait des hôpitaux, fondait des séminaires, instituait une Congrégation de Missionnaires pour annoncer la parole de Dieu, une Congrégation de filles pour aller de toutes parts secourir les malades ; et un Cardinal de l’Eglise Romaine établissait une académie de Missionnaires du vice de l’un et de l’autre sexe : les Actrices de l’opéra et des Sœurs de la charité ; des Acteurs, et des Lazaristes ; des hôpitaux et des théâtres ; des sommes immenses répandues d’un côté pour soulager des pauvres, de l’autre pour payer des Musiciens et des Danseurs, etc. Si ces deux hommes sont en paradis, ce qui n’est pas un article de foi, on peut bien assurer qu’ils ne sont pas sur la même ligne. C’est au jugement de Dieu un faible titre à sa gloire que l’établissement de l’opéra. Si nous en croyons l’Auteur des Lettres Chinoises (Tom. 1. Lett. 22.) qui le connaissait bien, « Les plus dangereuses Courtisanes sont les Danseuses et les Chanteuses de l’opéra ; il semble que ce soit une nécessité fatale que tout ce qui a rapport à l’opéra soit corrompu partout. Il est vrai que les Persans prisent les choses selon leur valeur ; quoiqu’ils aiment infiniment les Danseuses et les Musiciennes, ils regardent la danse comme un art infâme, surtout pour les femmes. Toutes les Danseuses en Perse sont des femmes publiques, celles de la troupe du Roi sont les plus débauchées, et imitent parfaitement celles de Paris. Elles ont dix-huit cents livres par an, et des étoffes pour s’habiller ; mais à Ispahan, comme à Paris, ce sont leurs moindres profits, les présents de leurs amants vont souvent dans un jour beaucoup plus haut que leurs appointements d’une année. (Lettre 24.) L’on a rassemblé à l’opéra tout ce qu’il y a de plus capable de flatter les passions ; la vue, par des décorations superbes ; l’oreille, par une musique harmonieuse ; le cœur, par les vers et les chants les plus tendres. Les danses animent aux plaisirs les plus séduisants ; quoique d’une manière différente, les mêmes objets toujours également flatteurs, produisent le même effet, ils inspirent toutes les passions. Quelque philosophe qu’on soit, il est impossible d’aller à l’opéra sans ressentir des mouvements que la plus héroïque vertu ne saurait étouffer. »

Dès 1581 un Italien, nommé Balthazarini, qui prit le nom de Beaujoyeux, accompagné d’une bande de violons dont il était le chef, fut employé par Catherine de Médicis pour donner des ballets à la Cour. Il en donna de magnifiques pour le temps ; les Poètes l’appelaient esprit divin, géomètre inventif, unique en sa science. On ne s’attend pas à la qualité de géomètre pour un violon. Il fut surtout donné une fête superbe aux noces du Duc de Joyeuse, un des mignons d’Henri III, qui coûta plus de douze cen mille écus, ce qui revient à six millions de notre monnaie. Ronsard et Baïf, les Quinault de leur temps, qui avaient fourni les vers à Beaujoyeux, eurent chacun deux mille écus (trente mille livres) en récompense. Les guerres civiles, qui donnaient à la France des spectacles bien différents, firent tomber toutes ces folies ; il ne fut plus question de Balthazarini. Marie de Médicis, épouse d’Henri IV, les fit renaître. Un nommé Rinouci ou Rinoucini, Musicien et Poète, s’était pris à Florence d’une belle passion pour cette Princesse, et se flattait d’en être aimé. Il la suivit en France, où il espérait qu’une plus grande liberté qu’en Italie, ses vers, sa musique, ses ballets couronneraient son amour. Il donna en effet plusieurs fêtes ; mais la vertu et la fierté de la Reine le déconcertèrent. Il eut la folie de s’en plaindre et de confier ses sottises. Les menaces qu’on lui fit, et les railleries dont on l’accabla, l’obligèrent de s’en retourner. (Menagian. Tom. 3.). On continua à faire des ballets et des mascarades, mais avec plus de profusion que de goût, plus de bruit que d’agrément, plus de pointes, de rimes, de fades allusions, que de bonne poésie. Cependant l’Opéra brillait à Venise. Depuis 1637 qu’il y commença, jusqu’en 1700, il y a été joué six cent cinquante pièces, quoiqu’on ne représente que dans l’hiver, que les machines y coûtent infiniment, et que l’on donne pour chaque carnaval douze mille livres à chaque Musicien ou Acteur d’une habileté supérieure. (Hist. de l’Opéra).

En 1645 il plut au Cardinal Mazarin de joindre à tant de scènes qu’il donnait à la France, l’établissement de la tragédie en musique et en machines. Il en fit toute la dépense, il fit venir de Rome la Signora Léonore pour chanter, Torrelli pour les machines, et une troupe d’Acteurs et d’Actrices Italiens pour représenter. Les décorations seules coûtèrent plus de quatre cent mille liv. (Vie de Madame de Longueville, L. 1. pag. 78). Le premier opéra représenté devant le Roi, fut une pièce Italienne intitulée, la Forta dela finta parla ; deux ans après il en fit donner une nouvelle sous le nom d’Orfiò et Euridice. Tous les Poètes célébrèrent ces nouveautés, et s’épuisèrent à l’honneur du Ministre. Elles furent admirées ; les voix, les habits, les décorations, tout y parut surprenant. Il fut suivi de quantité de bals, ballets, mascarades, dont on ne cessait d’amuser le Roi et la Cour, et où les Italiens jouaient un grand rôle. Enfin pour célébrer le mariage du Roi et les amours, sous le grand nom d’Hercule, il fit donner un troisième opéra Italien intitulé, Hercole amante. Mais comme il n’avait plus pour lui la nouveauté, que peu de personnes entendaient cette langue, et qu’on avait déjà donné des opérasl Français, à l’imitation des Italiens, qui avaient tourné le goût de la nation, cette pièce, quoique représentée avec une magnificence prodigieuse, ne réussit pas.

En effet depuis quelques années on avait essayé de faire des opérasm Français, et par une destinée singulière les deux premiers furent composés par des Ecclésiastiques, que les canons de l’Eglise n’avaient jamais chargén de cet emploi, et qui ont été suivis par Boyer, Pic, Pélegrin, la Mothe, Abeille, etc. Benserade, enrichi de plusieurs pensions sur des bénéfices, fit Cassandre, qui fut représentée au Palais Cardinal. L’Abbé Perrin fit Pomone Pastorale, très mauvaise pour les vers, mais dont la musique et les décorations plurent beaucoup. Elle fut d’abord donnée ainsi chez un particulier. La Troupe Royale des Comédiens Français donna de son côté Andromède de Corneille. Le Marquis de Sourdeac, de la maison de Rieux, fit représenter avec la magnificence d’un Prince la Toison d’Or, du même Auteur. Le Roi, la Reine, toute la Cour, toute la France, furent enchantéeso de la nouveauté et de la beauté de ces fêtes : elles effaçaient celles du Cardinal. Richelieu leur eût cherché quelque querelle, mais Mazarin n’était pas jaloux de gloire, il n’était curieux que d’argent. Il les animait au contraire, les favorisait, les adopta même, les fit jouer à la Cour, et sans beaucoup s’embarrasser des bienséances, il engageait le jeune Roi, les Princes, les Princesses, les plus grands Seigneurs, à y prendre des rôles, à s’y déguiser en dieux, en déesses, faunes, satyres, bergers, etc. à y danser, à y chanter. Louis XIV, avancé en âge et rendu à lui-même, en rougit. Cet émule de Richelieu voulut encore l’imiter par une pièce allégorique. Richelieu avait donné l’Europe, où sous les noms maussadement déguisés de Francion, Ibère, Germanique, Ausonie, il insultait tous les Souverains. Mazarin fit jouer le mariage du Roi avec l’Infante sous les noms de Lysis (la France), et d’Hespérie (l’Espagne). Il n’avait ni le goût ni le génie de son prédécesseur, il n’en donna point le canevas ; il chargea le Secrétaire d’Etat de Lionne de la faire composer, et Lionne en chargea Quinault, qui commençait à paraître. Il ne réussit pas. Lysis, non plus qu’Europe, n’ont plus paru sur aucun théâtre.

Il y a pourtant une grande différence entre ces deux pièces. La Lysis de Mazarin n’est qu’une allégorie flatteuse à l’honneur des deux augustes époux et un éloge de la paix que leur mariage procurait à l’Europe, ce qui a été cent et cent fois innocemment pratiqué dans les événements publics : la plupart des prologues des opérasp sont dans ce goût. Mais l’Europe de Richelieu était une satire très maligne de tous les Princes qui faisaient la guerre à la France. Toutes ces pièces politiques qui font allusion aux affaires d’Etat, où l’on tâche de rendre ridicules et odieux aux peuples les Souverains ennemis, sont contraires à la sagesse du gouvernement : on doit respecter la majesté du Trône, même dans des ennemis ; la faire mépriser au peuple, c’est l’accoutumer à ne pas respecter son propre maître. Je ne voudrais pas qu’un Magistrat laissât déchirer d’autres Magistrats, qu’un Général d’armée permît de se moquer des autres Généraux, ni que la Police tolérât des libelles, des comédies, contre des puissances étrangères : Diis non detrahes. Ces indécences ne sont pas rares dans l’histoire sans sortir de la France. Philippe le Bel fit jouer Boniface VIII ; après l’avoir traité de fat dans ses lettres, il le tourna en ridicule sur le théâtre. Pendant le schisme de Clément VII, Jeanne Reine de Naples fut la matière d’une pièce qui dura cinq jours, où on noircit toute sa vie, parce qu’elle tenait pour un autre Pape opposé à la France. Louis XII fit composer par les Enfants sans souci trois Soties ou Sottises, farces du temps, contre Jules II et sa cour, où l’on mêlait le Clergé, la pragmatique sanction, etc. (Menagiana, Tom. 7.). Il fut joué lui-même et traité d’avare. Il ne faisait qu’en rire, pourvu qu’on ne touchât pas à la Reine sa femme, pour laquelle il n’était pas traitable. Ce Prince cependant était délicat sur les bienséances. La Mothe le Vayer (Lettre 47. sur les Magistrats) rapporte d’après Fevret, C. 3, que Louis XII ayant trouvé des Conseillers au Parlement jouant à la paume, il leur en fit une sévère réprimande, leur protestant « que s’il les y trouvait encore, il ne les reconnaîtrait pas pour Conseillers, et ne ferait pas plus d’état d’eux que du moindre cadet de ses Gardes ». Mais la passion aveugle les meilleurs cœurs. Souffrirait-on aujourd’hui ce qu’il applaudissait, des scènes où les Evêques se battent à coups de poing sur le théâtre ? laisserait-on dire à un Arlequin : « Nos Prélats ne sont point ingrats, ils ont fait pendant ces jours gras, banquets, beignets et grand fracas, pour les mignonnes de la ville. » (Histoire du Théat. Franç. Tom. 3. p. 202. 206.). François I. sachant mieux se respecter, et n’ayant pas les mêmes motifs, supprima cette licence qui n’épargnait pas les têtes couronnées, que son prédécesseur avait ouvertement autorisée. Louis XIII n’aurait jamais laissé jouer l’Empereur et le Roi d’Espagne, s’il eût été assez maître pour arrêter Richelieu. Il est même étonnant que Richelieu, qui était grand d’ailleurs, se soit abaissé jusque là ; mais son enthousiasme poétique le rendait si petit. Après s’être fait un triomphe de la critique du Cid, une affaire sérieuse du succès de Mirame, il pouvait se faire un mérite de ses sarcasmes contre Ferdinand et Philippe. Louis XIV fit semblant de ne pas entendre, ou peut-être n’entendit-il pas les traits malins lancés dans la tragédie d’Esther contre Innocent XI et le Prince d’Orange, ainsi que plusieurs autres dans les prologues des opérasq ; du moins est-il certain qu’ils ont tous été hasardés sans son aveu. Ce Prince connaissait trop la dignité du Trône, pour s’amuser de ces lâches petitesses, qui n’aboutissent à rien qu’à faire mépriser et haïr celui qui a la faiblesse de les goûter. Qu’en revient-il à l’Etat ? facilitent-elles quelque négociation ? affaiblissent-elles les armées ? remportent-elles des victoires ? Elles nuisent plutôt, en aigrissant les esprits des Princes joués, qui ne manquent guère d’en être instruits, et qui souvent assez faibles pour y être sensibles, cherchent à s’en venger. Les particuliers eux-mêmes se dégradent en employant le lâche poison des libelles satiriques ou se montrant offensés des traits obscurs de la satire. Une si basse vengeance et une si puérile sensibilité sont indignes d’un grand cœur ; combien sont-elles au-dessous d’un grand Prince, qui tout occupé des grands intérêts de l’Etat, doit ignorer les bas artifices de l’amour propre ?

Mazarin avait le même intérêt que Richelieu à endormir la Cour dans les plaisirs, pour dissiper les innombrables factions qui l’agitaient. Il en avait un autre, c’était de dissiper le jeune Roi par des amusements de son âge, pour le tenir en tutelle et gouverner seul. Il y réussit. Le Roi, tout occupé de danses, de musique, de jeu, de spectacles, le laissa maître absolu jusqu’à sa mort ; il en profita pour amasser jusqu’à deux cent millions qu’on trouva dans ses coffres. Ces frivoles amusements occupèrent si bien ce Prince, qu’il n’eut pas même l’éducation convenable, et ne dut qu’à son génie les grandes choses qu’il fit durant son règne. Si c’est là de la bonne politique, ce n’est pas au moins de celle qui fait l’avantage ni du peuple ni du Souverain, et jamais le goût du théâtre n’entra dans le nombre des choses qu’ils ont dû souhaiter l’un et l’autre pour un utile gouvernement. Je n’impute pas à Mazarin, comme on le soupçonnait de Richelieu, d’avoir voulu changer les mœurs de la nation et l’amollir, pour l’asservir, lui forger des fers dans le théâtre, et la désarmer par les mains de la frivolité. Mazarin ne portait pas si loin ses désirs et ses vues ; il n’était rusé que pour le moment, comme un joueur qui écarte ou jette à propos une carte ; il savait parer un coup, tendre un piège, trouver un abri dans un orage, et le laisser passer. Mais pourvu qu’il amassât des trésors, qu’il plaçât bien sa famille, il ne faisait pas de si vastes combinaisons pour l’avenir, et ne s’embarrassait guère de ce qui arriverait après lui. Une pièce de théâtre était pour lui comme un repas donné au luxe, au plaisir, à une petite intrigue ; jamais il n’en envisagea ni le bien ni le mal moral, et ne le prépara comme un ressort secret de quelque grand événement. Les mœurs n’en souffrirent pas moins, et le théâtre s’autorisait de plus en plus sous ses auspices.

Cependant le théâtre ne jouit pas sans trouble de sa gloire sous Mazarin. Voici ce qu’en dit Madame de Motteville dans ses Mémoires, sous 1647 (Tom. 1. pag. 409.) : La Reine (Anne d’Autriche) aimait la comédie, et se cachait pour l’entendre, l’année de son grand deuil ; car hors de là elle y allait publiquement. Le Curé de S. Germain de l’Auxerrois (Curé de la Cour) homme pieux et sévère, lui écrivit qu’elle ne pouvait en conscience souffrir la comédie, surtout l’Italienne, comme plus libre et moins modeste. Cette lettre troubla la Reine, qui ne voulait souffrir rien de contraire à ce qu’elle devait à Dieu. Elle consulta sur ce sujet beaucoup de Docteurs. Plusieurs Evêques lui dirent que les comédies qui ne représentaient que des choses saintes, ne pouvaient être un mal ; que les Courtisans avaient besoin de ces occupations pour en éviter de plus mauvaises ; que la dévotion des Rois devait être différente de celle des particuliers, et qu’ils pouvaient autoriser ces divertissements. Ainsi la comédie fut approuvée, et l’« enjouement, (la licence) de l’Italienne se sauva sous la protection des pièces sérieuses ». Le Curé de S. Germain parla de nouveau ; il prouva à la Reine que ce divertissement était un péché mortel, et lui rapporta son avis, signé de sept Docteurs de Sorbonne qui étaient de son sentiment. Cette nouvelle réprimande renouvela l’inquiétude de la Reine. Elle envoya l’Abbé de Beaumont, Précepteur du Roi, consulter la Sorbonne. Il se trouva dix ou douze Docteurs qui décidèrent que supposé que dans la comédie il n’y eût rien de scandaleux, ni de contraire aux bonnes mœurs, on pouvait l’entendre ; que l’usage de l’Eglise avait beaucoup diminué de la sévérité apostolique des premiers siècles ; ainsi la conscience de la Reine fut en repos. « Mais, ajoute Madame de Motteville, si cela est, malheur à nous d’avoir dégénéré de la vertu de nos pères, et d’être devenus infirmes dans notre zèle et notre fidélité. » Les Courtisans crièrent contre le Curé, et le traitèrent de ridicule ; ils eurent la malignité de dire que le P. Vincent de Paul, homme d’une grande piété, avait suscité tout cela pour ruiner Mazarin. Mais la Reine dit qu’elle n’en croyait rien.

Voltaire (Siècle de Louis XIV) rapporte ce fait, mais n’en parle pas si religieusement ; il veut tirer avantage en faveur de la comédie, de ce que M. de Beaumont, devenu Archevêque de Paris, confirma par son silence la décision qu’il avait fait rendre en Sorbonne. Le silence d’un Evêque sur un mal qu’il ne peut empêcher, n’est rien moins qu’une approbation ; mais si M. de Beaumont fut indulgent pour les spectacles, ce que j’ignore, et dont la garantie de Voltaire n’est qu’une preuve bien légère, M. de Harlay, son successeur, Prélat très éclairé, et que Voltaire lui-même taxe encore moins de rigorisme, a pourtant fait une affaire sérieuse au P. Caffaro, Théatin, pour avoir osé écrire en faveur de la comédie, et l’a fait authentiquement rétracter (ce fait reviendra ailleurs fort au long). Pour M. de Noailles, successeur de celui-ci, la régularité de ses mœurs, la sévérité de sa morale, ne l’ont jamais laissé soupçonner, même de tolérance ; et dans le même temps M. Bossuet, Prélat dont toute la France connaît les lumières supérieures, fit contre la comédie un très bon ouvrage qui est entre les mains de tout le monde. On ne dira pas qu’un autre Beaumont, aujourd’hui Archevêque de Paris, lui soit plus favorable. Rendons justice au Clergé de France, jamais sa morale sur cet article n’a souffert le moindre nuage.

Cette prétendue décision de quelques Docteurs de Sorbonne consultés par le Précepteur du Roi, ne se trouve en aucun endroit, et si elle était vraie, elle devrait se trouver partout. Au contraire, Messieurs Lamet et Fromageau, qui connaissaient bien la Sorbonne, dont ils étaient Docteurs, prouvent au long (Dict. v. Comédie) que cet illustre Corps a toujours condamné le théâtre. Mais cette décision fût-elle véritable, qu’en peut-on conclure ? Est-il bien difficile à une Reine Régente qui aime le spectacle jusqu’à y aller incognito pendant le grand deuil du Roi son mari, et à un Ministre aussi puissant que Mazarin, qui l’aimait jusqu’à le donner dans sa maison et à faire venir en France la comédie Italienne, toute indécente qu’elle est, de trouver quelque Docteur de Cour qui se dise de son sentiment, et de faire passer la licence des Italiens sous la protection du sérieux Français ? Encore même ces Docteurs y mettent des restrictions qui rendent leur indulgence inutile. Ils supposent qu’on ne représente que des pièces sérieuses, où il n’y a rien de dangereux pour les mœurs. Belle chimère, que le théâtre ne vit et ne verra jamais, et qui donnant le change sur le véritable état des choses, fait sentir des gens embarrassés, qui ne veulent que se tirer d’affaires dans une occasion critique où ils n’osent ni blesser la vérité, ni déplaire en la disant nettement. Quant à ce qu’on leur fait dire que le Prince n’a pas le même Evangile à suivre que les particuliers, que l’Eglise d’aujourd’hui n’est pas aussi sévère que celle des premiers siècles sur la condamnation du vice et les occasions du péché, c’est une morale de courtisan que la Sorbonne n’a jamais enseignée et autorisée par ses décisions. Aussi Madame de Motteville, qui fut toute sa vie attachée à la Cour, ne parle de cette prétendue décision qu’en doutant et en gémissant : Si cela est, malheur à nous, dit-elle. Mais tout cela est faux, dans le fait la consultation très raisonnée de la Sorbonne est rapportée tout au long dans le Dictionnaire de Fromageau, et n’a jamais été contredite.

Boursault dans ses lettres, (Tom. 2. Let. 7.) veut étayer la comédie du suffrage du Cardinal de Richelieu, et aussi de celui de la Sorbonne. Il fait de ce Ministre un grand Théologien et un grand Evêque. Je ne lui conteste aucune de ses qualités, mais je suis bien sûr qu’aucun Evêque ni aucun Théologien ne voudrait suivre en ce point son exemple. Boursault a tâché d’y joindre la Sorbonne, et ce suffrage ne serait pas indifférent ; mais moins instruit que Voltaire, quoique contemporain, il ne le donne pas pour certain, il ne fait que le présumer : « La Sorbonne, dit-il, qui lui est si redevable de tant de bienfaits, peut-elle condamner ce qu’approuve ce grand homme ? ce serait donner atteinte à sa mémoire. » Comme si les bienfaits de Richelieu pouvaient obliger la Sorbonne à trahir la vérité. Sans doute elle n’alla pas lui jeter à la tête ces condamnations de la comédie, qu’il faisait représenter à la ville et à la campagne. La Sorbonne ne parle que quand on l’interroge, et le Cardinal ne la consulta pas, Elle ne parle jamais de la conduite de personne, encore moins des Ministres d’Etat. Elle ne s’est jamais érigée en réformatrice ; mais jamais elle ne s’est écartée de ses principes, et la consultation très étendue, rapportée tout au long par Fromageau, prouve combien elle est éloignée des sentiments qu’on lui attribue.

Boursault va plus loin, car aux Poètes, et surtout aux Poètes comiques, « quid liber audendi semper fecit æqua potestas » ? il remonte jusqu’au Pape, qu’il prétend amateur et approbateur de la comédie, et par un trait d’érudition qu’on ne soupçonnerait pas en lui, jusqu’au Pape Alexandre III, qu’il dit avoir eu chez lui un théâtre dont il faisait les honneurs, et où, comme de raison, il occupait la première place. Il est vrai qu’il n’est pas d’accord avec le P. Caffaro son Confesseur (à ce qu’il dit) dont il a fait imprimer la lettre à la tête de ses œuvres. Celui-ci ne fait aller les Papes que quelquefois aux pièces qui se jouent dans les collèges ou les maisons religieuses, ce qui se réduit à quelque exercice littéraire auquel le Pape aurait la bonté d’assister, ce qui ne fut jamais autoriser par sa présence la comédie publique. On aura beau chercher dans les descriptions de Rome et d’Italie, les plus détaillées, même les plus malignes, comme le Voyage de Misson, on ne trouvera de théâtre papal que dans la tête de Boursault. L’histoire ecclésiastique fournit tout aussi peu de théâtre patriarcal à Antioche, à Constantinople, à Alexandrie, ou de théâtre épiscopal dans aucun diocèse ; on ne trouvera dans toute l’Eglise catholique que le Théâtre Cardinal de Richelieu.

Ce trait d’érudition de Boursault a quelque chose de comique, qui ferait honneur au Trissotin de Molière. Il rapporte un long passage Latin des Annales de Baronius, dont peut-être il n’avait jamais vu la couverture, et dont assurément il n’aurait pu expliquer le titre, puisque de son aveu il n’entendait pas un mot de Latin ; il prétend qu’Alexandre III, en récompense des services que lui avait rendus la République de Venise, accorda au Doge l’honneur insigne d’avoir la troisième place sur le théâtre du Pape, après l’Empereur, qui avait la seconde. Le Pape, dit-il, avait donc un théâtre à lui pour voir la comédie (quoique le Latin n’en parle pas) : il autorise donc, il sanctifie la comédie. Peu s’en faut que Boursault n’emploie l’infaillibilité du Pape pour faire un article de foi de la sainteté des spectacles. Cette historiette est dans le goût de celles de M. Cahusac, qui dans son Traité de la Danse, nous apprend que le Concile de Trente donna le bal à Philippe II, Roi d’Espagne, et que le Cardinal Légat, Président, en fit l’ouverture par une gavotte.

Le fait d’Alexandre III a été avidement saisi par les Centuriateurs de Magdebourg et tous les autres Ecrivains Protestants. Il est vrai que les Centuriateurs ne parlent que du théâtre Romain, sur lequel le Pape, comme Souverain de Rome, pouvait donner des places d’honneur à l’Empereur et au Doge, mais non, comme dit Boursault, d’un théâtre papal pour Sa Sainteté, qui n’y eût pas été trop bien placée. Ce trait serait curieux, il éclaircirait la chronologie du théâtre, il montrerait dès le douzième siècle un spectacle régulier à Rome et à Venise, tandis que toutes les histoires ne font renaître le théâtre en Europe, depuis la domination des Goths, que plusieurs siècles après. Il n’y avait alors que quelques gueux qui chantaient, gambadaient, jouaient des tours de passe-passe, et quelques Troubadours qui allaient contant leurs fabliaux, spectacle pour lequel un Comédien même n’imaginerait pas que le Pape eût un théâtre où il se plaçait en cérémonie. Mais Boursault n’était rien moins qu’un Docteur irréfragable. En vérité Alexandre et Frédéric, dans le peu de jours qu’ils furent à Venise, avaient des affaires trop importantes pour aller à la comédie, qui même n’était ni dans leur goût ni dans celui de leur siècle. C’est sans doute une équivoque de celui qui fournit des mémoires à Boursault, s’il n’a voulu se moquer de lui. Le mot théâtre ne signifie là qu’une estrade élevée de quelques marches, où le Pape se plaça (pour recevoir les Ambassadeurs), et ensuite l’Empereur, lui donner l’absolution, et jurer la paix qui fut conclue entre eux : estrade sur laquelle il était naturel de placer ce Prince à la droite du Pape, et par honneur à la gauche le Doge, Souverain du lieu. Mais un faiseur de comédies voit partout des théâtres.

Voici ce qui peut avoir donné lieu à la malignité ou à la méprise de l’Auteur des mémoires fournis à Boursault. Après une guerre et un schisme de dix-huit ans le Pape Alexandre III et l’Empereur Frédéric firent la paix à Venise ; le schisme cessa, et Alexandre fut reconnu Souverain Pontife. Il y a deux relations différentes, rapportées tout au long par le Cardinal Baronius à l’année 1177, des circonstances de cette paix, l’une fort simple et fort naturelle par deux témoins oculaires de grand poids : Chroniq. Romuald. Archevêque de Salerne : Acta Alexandri III. par un Prélat de sa suite. On n’y trouve que le voyage du Pape à Venise sur les galères du Roi de Sicile, des ambassades, des congrès en divers endroits, des entrevues des deux Puissances avec tous les égards que se doivent les Souverains et les cérémonies usitées en ces occasions, et même des marques mutuelles d’amitié, de respect, de confiance, suites d’une réconciliation sincère, telles que les suites ne permettent pas d’en douter. Cette relation, seule authentique, a été généralement suivie par tous les Historiens raisonnables, Baronius, Agi, Fleury, Alexandre, etc.

L’autre relation, que les Centuriateurs et la plupart des Protestants ont préférée, sans pourtant la donner pour certaine, est chargée d’événements romanesques et de circonstances ridicules ; le Pape qui s’enfuit déguisé en cuisinier, qui est découvert par hasard travaillant dans un jardin ; le fils de l’Empereur, fait prisonnier, qui oblige son père à faire le paix pour le délivrer ; le Pape qui met le pied sur la tête de l’Empereur prosterné, en lui disant ces paroles, « super aspidem et basilicum ambulabis » ; le Pape, l’Empereur et le Doge sur un théâtre ; le Pape donnant des indulgences autant qu’il peut tenir de grains de sable dans une poignée à deux mains, accordant au Doge, en récompense de ses services, un cierge de cire blanche, le droit de porter des fanons à son bonnet, comme une mitre d’Evêque, de sceller ses lettres avec du plomb, et d’avoir ses étendards bigarrés de diverses couleurs, comme un habit d’Arlequin. On sent bien que ce conte maussade, que le P. Alexandre appelle avec raison putidissima fabula, a dû être du goût d’un Comédien. Il est encore dans son caractère de donner pour garant de ces faits le Cardinal Baronius, qui les combat précisément, et fait voir la fausseté de cette relation, qu’on dit se conserver manuscrite dans la bibliothèque de S. Marc à Venise, et ces faits peints sur les vitraux de quelque Eglise et je ne sais quel tableau dans l’arsenal de cette ville. Voilà les titres du théâtre, et les faits sur lesquels il établit son innocence, ou plutôt sa sainteté, et la foi que méritent ses défenseurs.

Il y aurait plus d’apparence de raison de citer les pièces de théâtre représentées devant Léon X et Clément VII, tous deux de la maison de Médicis. Ce ne furent d’abord que de jeunes gentilshommes Romains, qui jouaient sans doute fort décemment, comme dans les collèges. C’était une nouveauté qu’on applaudissait pour donner de l’émulation aux arts et aux sciences, dont Léon X se faisait gloire d’être le restaurateur. Le Cardinal Bernard de Bibiane fit représenter en 1516 devant Léon X la comédie intitulée, la Kalandre, une des premières qui aient paru en machines (Vie de Quinault, pag. 6.). Ils étaient plus grands Princes que bons Pontifes. Ils en furent généralement blâmés, et n’ont été imités d’aucun de leurs successeurs. La dissipation, le goût du luxe et du plaisir, firent du mal à l’Eglise ; Dieu ne bénit pas leur pontificat, il fut très malheureux, l’un par l’hérésie de Luther, qui ravagea toute l’Allemagne, l’autre par le sac de la ville de Rome par le Connétable de Bourbon et les troupes de Charles Quint. Une comédie en musique, avec quelque machine et quelque décoration, légère ébauche de l’Opéra, avaient été inventées par Octavio Ranucci ou Rainucini, Poète Florentin. Il en fit le premier essai devant le grand Duc de Toscane, d’où elles furent portées à la Cour de ces Papes et à Venise, et de là en France par Marie de Médicis, épouse d’Henri IV. Ce Poète la suivit, quand elle vint à Paris, il en était amoureux, et croyait sans doute que les charmes de ses vers et de ses pièces de théâtre l’en feraient aimer. La vertu et la fierté de la Reine lui firent bientôt perdre contenance. Il fut assez étourdi pour faire confidence de ses sottises, et les railleries piquantes qu’on en fit l’obligèrent à quitter la France (Menag. T. 3. v. Rainucci). Avec lui s’évanouirent toutes les idées de l’Opéra qu’il avait projeté d’établir, lorsque quarante ans après il plut à un autre Italien (Mazarin) de faire ce bel établissement. Ce Ministre, comme l’on voit, a fait plus d’une espèce de maux à la France.

Finissons ce chapitre par un trait singulier d’un Evêque du douzième siècle, qui tenait un peu du Mazarin. Il se tint à Châlons en 1107 une célèbre conférence sur l’affaire des investitures, entre le Pape Paschal II et les Ambassadeurs de l’Empereur Henri IV (l’Archevêque de Trèves…) C’était lui, dit l’Abbé Suger (Vit. Ludovic. Gross. C. 9.), qui était singulièrement et presque uniquement l’âme de l’ambassade, singulariter et solus. C’était un homme élégant et agréable, vir elegans et jocundus (un petit maître), un homme exercé par le cothurne Français, Gallicano cothurno exercitatus (un Comédien), qui pérora d’une manière facétieuse, facete peroravit (en plaisantant légèrement). L’Empereur comptait beaucoup sur les grâces de ce joli Prélat, qui sans doute de son côté était fort content de sa personne et de son mérite théâtral. Le Pape, malheureusement grave et sérieux, n’aimait pas la comédie. Il fut peu enthousiasmé du jeu de l’Acteur Ambassadeur, et le renvoya sans rien accorder. La négociation échoua. Dans le fond un Comédien, fût-il Molière ou Baron, n’est pas fait pour traiter avec un Pape sur l’affaire des investitures. Maimbourg, qui rapporte ce fait (Décad. de l’Emp. Tom. 2. L. 9.) traduit mal le passage de Suger qu’il cite. Il dit que cet Evêque était un homme « poli, agréable, qui avait l’air tout à fait Français, et parla d’une manière également forte et agréable », ce qui ne rend point du tout le cothurno Gallicano exercitatus facete peroravit, à moins que Maimbourg ne pense que l’air Français est un air de théâtre, qu’un homme poli et agréable est un Comédien, et que les facéties sont des traits de force. M. Fleury et les historiens de l’Eglise Gallicane suppriment cet endroit-là, et ne parlent ni du théâtre ni de l’air Français. Ont-ils cru devoir sacrifier la vérité à la décence ? Je sais bien que Melpomène n’avait point alors tous les atours dont à su la parer Racine, ni le Clergé petit-maître toutes les grâces que répand sur leur tête la main d’un habile baigneur ; mais je ne sais par quelle fatalité le théâtre et l’Eglise, la comédie et la sagesse, les airs d’un actrice et les affaires de l’Etat, ne furent jamais d’intelligence, quoiqu’une mauvaise politique ou des passions criminelles aient souvent essayé de les réunir.