II.
Comme la passion de l'amour est la plus forte impression que le péché ait faite dans nos âmes, ainsi qu'il paraît▶ assez par les désordres horribles qu'elle produit dans le monde; il n'y a rien de plus dangereux que de l'exciter, de la nourrir, et de détruire ce qui la retient. Or le principal frein qui sert à l'arrêter est une certaine horreur que la coutume et la bonne éducation en impriment ; et rien ne diminue davantage cette horreur que la Comédie; parce que cette passion y ◀paraît▶ avec honneur et d'une manière qui, au lieu de la rendre horrible est capable au contraire de la rendre aimable. Elle y ◀paraît sans honte et sans infamie. On y fait gloire d'en être touché. Ainsi l'esprit s'apprivoise peu à peu. On apprend à la souffrir et à en parler, et l'âme s'y laisse ensuite doucement aller en suivant la pente de la nature.