(1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [L] » p. 425
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(1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [L] » p. 425

[L]

La convenance des vêtemens est aussi importante que celle des Décorations. Il s’est introduit à cet égard un abus aussi difficile à concevoir qu’à détruire. Tantôt c’est Gustave qui sort des cavernes de Dalécarlie avec un habit bleu-céleste à paremens d’hermine ; tantôt c’est Pharasmane, qui, couvert d’un habit de brocard d’or, dit à l’Ambassadeur de Rome :

La nature marâtre, en ces affreux climats.
Ne produit, au lieu d’or, que du fer, des soldats.

De quoi donc faut-il que Gustave, Pharasmane soient vétus ? L’un de peau, l’autre de fer. Comment les habillerait un grand Peintre ?… Il faut donner, dit-on, quelque chose aux mœurs du temps. Il falait donc aussi que Lebrun frisât Porus, & mît des gants à Alexandre ? C’est au Spectateur à se déplacer, non au Spectacle ; & c’est la réflexion que tous les Acteurs devraient faire, toutes les fois qu’ils vont jouer ; on ne verrait point César en perruque quarrée, ni Ulysse sortir tout poudré du milieu des flots. [On commence à corriger ces inconvenances].

Aux reproches que nous fesons aux Comédiens sur l’indécence de leur vêtement, ils peuvent opposer l’usage établi, aux yeux d’un Public qui condanne sans entendre, & rit avant de raisonner. Nous savons que ces excuses ne sont que trop bien fondées : nous savons de plus que ces réflexions ne produiront aucun fruit.

[Septimanie.

Pourquoi non ? Moi, j’en espère beaucoup : elles sont si sensées, qu’elles impressionneront, & seront suivies de la réforme indiquée & desirée].

Mais notre ambition ne va pas jusqu’à prétendre corriger notre siècle.

[Adelaïde.

Rien ne me satisfait moins que les prétendus Habits de Paysannes qui sont en usage sur nos Théâtres : il vaudrait autant que les Actrices conservassent leurs vêtemens ordinaires ; ils ressembleraient au-moins à ceux d’une condition quelconque : au-lieu que ceux de nos rôles de Villageoises du Théâtre Français ; & ceux de Ninette, Rose, Annette, au Théâtre Italien, ne ressemblent à rien, & nuisent à l’illusion. Mais à quoi serviraient les Habits de Village, si les Pièces en peignent si peu les véritables mœurs ?]