(1687) Avis aux RR. PP. jésuites « [Introduction] » pp. 4-5
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(1687) Avis aux RR. PP. jésuites « [Introduction] » pp. 4-5

[Introduction]

Il est étrange, Mes Révérends Pères, que vous ayez si mal profité des Avis que l’on donna l’année passée à vos Confrères de Luxembourg sur leur scandaleuse Procession ; et que l’on soit obligé de vous en donner de semblables sur ce que vous venez de faire à Aix qui n’est pas moins indigne de Chrétiens, de Religieux et de Prêtres.

Si vous aviez consulté vos Pères de Paris, on ne doute pas qu’ils ne vous eussent conseillé de mieux ménager votre réputation et l’honneur de la Compagnie. Car on sait qu’ils n’ont pas approuvé qu’on eût employé toutes sortes de Divinités Païennes pour rendre honneur à la Vierge dans une Procession où on portait le S. Sacrement ; qu’ils en ont eu honte ; et qu’ils n’ont eu autre chose à dire, sinon que leurs Pères de Luxembourg étaient de bons Flamands qui n’avaient pas encore profité de l’avantage qu’ils ont d’être à la France ; que leur dévotion se raffinerait avec le temps, et que pour eux ils n’auraient garde de rien faire de semblable.

Que diront-ils maintenant qu’ils ne peuvent plus attribuer vos folies à la prétendue grossièreté d’un Climat étranger, puisque c’est en France et par des Jésuites Français qu’elles se sont commises, dans un Pays dont les habitants ne passent pas pour de bons Flamands, mais pour des esprits fort déliés, dans une Ville de Parlement, et aux frais de ses principales familles dont les enfants ont été vos Acteurs, et si on vous en croit, avec l’applaudissement de tout le monde ? S’ils sont raisonnables, ils avoueront que vous vous êtes justement attiré ces nouveaux Avis, et que les circonstances que je viens de marquer ne faisant que rendre votre action plus scandaleuse, on n’a pu sans faire tort à la Religion se dispenser de vous en faire une correction publique. Vous le devez trouver bon, Mes Pères, pour peu que vous ayez de Christianisme, et prendre pour une marque que l’on vous aime, de ce que l’on vous fait cette charité, selon cette belle parole de S. Augustin : « Magis amat objurgator sanans quam adulator unguens caput. »