(1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 248, 15 octobre 1907 — Fin du tour d’Italie en 1811 — [Premier extrait] — Chapitre LXV »
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(1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 248, 15 octobre 1907 — Fin du tour d’Italie en 1811 — [Premier extrait] — Chapitre LXV »

Chapitre LXV

Quand on n’a pas traversé le tapage de la rue de Tolède, on ne peut se figurer à quel point le peuple de Naples est criard, vif et gesticulateur. La danse, le chant et les instruments sont un goût général et qu’on satisfait dans tous les instants. Leur amour pour tout ce qui est spectacle perce de tous les côtés. Le peuple se sert beaucoup de tambours, de castagnettes et d’autres instruments qu’on dit d’origine grecque. On se doute bien que toutes les cérémonies de l’église sont des fêtes brillantes. (Tout ceci est vrai. L.) Les prêtres auraient été bien sots et bien peu de leur pays s’ils n’avaient pas pris ce parti. Aussi la religion est-elle une superstition pleine de vivacité. Les jours de fête, les églises sont changées en une espèce de théâtre, décoré d’étoffes et de musique, et toutes les chaises sont tournées vers l’orchestre et non du côté de l’autel.

Tout le temps que j’ai été chez M. Long, j’ai été assourdi par une Madone voisine dont c’était la fête. Toutes les dix minutes, 3 ou 4 trompettes sonnaient avec une force du diable. Le soir, la Madone, devant laquelle nous passions pour aller au théâtre ou sur le quai de la Chiaja, était illuminée à fond et les enfants, qui sautaient autour avec une joie extrême, nous lançaient des feux d’artifices entre les jambes en l’honneur de la Madone. Les frais de cette fête, qui étaient considérables, étaient supportés avec empressement par les voisins, par les Lazzaroni de la Contrado Egiziacha.

Au temps de Noël, tout est plein de Presepi qui représentent, en petit, la naissance du Sauveur, avec des figures et des paysages très bien exécutés. On en trouve dans chaque maison et quelques-uns méritent l’attention d’un homme de goût. L’architecture, les habitations rustiques, les ruines, les divers vêtements, les animaux, les rivières, les ponts, les montagnes, le ciel, les lointains, tout y est traité avec un art infini. — À Noël, le peuple fait des neuvaines, en disant ces Presepi, ou devant les Madones qui sont au coin des rues. Il vient alors, des montagnes, des paysans vigoureux qui jouent de la cornemuse ou d’autres instruments à vent devant les Madones.