(2016) Ticket_1049
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(2016) Ticket_1049

Je suis d'ordinaire très motivée et enchantée par tous les ateliers de double écoute qui nous sont proposés au cours de nos études, mais le bilan de cette garde au samu social est très mitigé. Je suis plutôt déçue et m'attendais à beaucoup mieux. Tout d'abord la double écoute à la régulation du 115 de 18h à 20h est franchement inutile, zéro valeur ajoutée à écouter des individus, étrangers pour la plupart s'exprimant dans un français très moyennement compréhensible, demander, voire exiger avec agressivité, une place d'hébergement pour la nuit; parfois même se plaindre d'être accepté dans une structure quand ils espéraient pouvoir aller ailleurs. On ne connait pas leur histoire et la conversation est limitée au côté technico-pratique de la demande d'hébergement = solution temporaire à un problème insolvable, ils rappelleront demain, puis après demain, puis ..... Aucun intérêt sur le plan humain, ne favorise en rien notre aptitude à l'écoute, mais exacerbe plutôt notre indignation vis à vis des personnes qui profitent d'une solidarité sociale dont ils ne se rendent pas compte de la valeur et qui estiment que tout leur est du alors qu'ils ne sont même pas français et ne parlent pas notre langue. Aucun intéret sur le plan médical non plus. La partie maraude est plus insolite, plus intéressante, même si c'est un peu difficile de partir pour une nuit blanche dans le froid glacial d'une nuit d'hiver, alors que l'on sort de garde de réa et que l'on n'a pas dormi depuis 26h. Quoiqu'il en soit, j'ai là aussi été très déçue de ce que m'a apporté cette expérience, je m'attendais à plus de contact avec les SDF, plus d'échanges humains, etc. Au final, à mesure que la nuit avance, les personnes que l'on rencontre sont de plus en plus alcoolisés et les échanges perdent alors tout intérêt, c'est une sorte de discours de sourd entre des clochards en état d'ébriété sur la voie publique, et nous - un peu comme pendant les gardes aux urgences, mais en moins bien car il n'y a pas le côté médical (suture de plaie ou suivi médical de l'alcoolisation chronique). Les autres cas rencontrés concernaient des familles de Roms qui mendiaient jusque minuit-1h avant de retourner dans leur caravane bien au chaud, et même s'il est triste de voir des enfants exploités de la sorte, là encore, l'intéret de l'échange est incertain - barrière de la langue, barrière de culture, ils ne comprennent pas pourquoi on veut les aider parce qu'ils ne sont pas vraiment dans le besoin; nous avons aussi vu des sans abris type "punks à chien", et dont le chien avait mordu quelqu'un quelques jours plus tôt ... tenu négligemment par sa propriétaire, trop occupée à fumer son cannabis pour se soucier de la sécurité - dans leur cas, les échanges concernaient des demandes d'hébergement d'urgence; peu d'échanges et de discussion donc centrées sur la personne, sur son histoire, etc. Ils veulent dormir au chaud, manger gratuitement et point barre. Le point positif était la gentillesse et la grande ouverture d'esprit du trinôme de la maraude. Au final, expérience très décevante qui ne nous ouvre en rien "plus" les yeux sur la réalité de la rue, à moins de vraiment être enfermé dans une cage dorée depuis son enfance. Sur le plan humain, une garde en réanimation ou une nuit aux urgences nous apporte mille fois plus en terme d'aptitude et de qualités relationnelles. Enfin, j'ai été très gênée par la proximité avec le chien dangereux d'une SDF qui est montée dans le camion à coté de moi; et par le fait de devoir être assise cote à cote dans le camion avec des individus parfois sales, malade (gale, etc) et très alcoolisés. Pour développer le coté humain et les qualités relationnelles des étudiants en médecine, maintenez plutôt les écoutes au SIDA info service, au CFCV, etc, encouragez les gardes aux urgences et en réa, .... à vouloir trop en faire on s’égare parfois. Il est aberrant que cette expérience soit obligatoire.