(2019) Ticket_45
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(2019) Ticket_45

Bonjour, Rentré il y a maintenant quelques heures de ce passage au samu social je me prends au jeu de décrire cette nuit. Ce fût une expérience très riche avec une équipe de professionnels de grande qualité. La rencontre avec des personnes de différents vivant dans le grand dénuement de la rue a, j'en ai déjà le sentiment, profondément modifié mon rapport à ceux-ci. Comment ne pas me reconnaître chez ce jeune homme qui me parle de l'enchaînement des drâmes de sa vie auparavant banale l'ayant mené à l'errance, comment ne pas souffrir dans les yeux de cette femme malade, abandonnée de tous ses proches pour avoir quitté son mari ou de cette autre qui, lasse de son horizon si vide de changements, dit économiser pour en finir chez les helvètes. Le regard c'est autre chose que les mots quand même, sutout quand on en a peu, celui de cette jeune femme forcée- faute de place en halte de nuit -de s'exposer une nuit de plus aux prédateurs de cette jungle de nuit, je ne l'oublierai pas de sitôt je crois. J'ai cependant été frustré de voir que nombre de demande n'aboutissaient pas et stupéfait de comprendre au téléphone que des familles passaient littéralement leur journée entière à tenter de joindre le 115, sursaturé d'appels, comme on le leur demande dans le seul vague espoir de voir leur dossier priorisé, ils deviennent esclaves du système destiné à les aider, ne pourraient ils pas simplement se signaler via une application plutôt que d'appeler sans espoirs pour la nuit qui vient? Ce système en particulier m'a, vous l'aurez compris, révolté, comment s'occuper de ses enfants , se trouver une situation stable au niveau financier tout en pointant tous les jours, tel un détenu libéré sous contrainte de se signaler chaque jour qu'il vit aux autorités, et cela parfois plus de 6 mois durant, et avec des femmes enceintes souvent, et avec des nourissons parfois. J'ai été impressionné par le dévouement de l'équipe que j'accompagnais et qui m'est apparue toujours a l'écoute, absolument pas désabusée ou amère malgré la longue expérience de certains. J'ai pu comprendre ce que ce service représentait pour ses usagers, les enjeux derrière une simple maraude. Leur travail m'est apparu indispensable, les moyens devraient être déployés dans ce sens, plus de lits d'accueil devraient être ouverts, en particulier. Aucune femme ne devrait rester sans protection dehors si elle souhaite s'abriter. Je pensais à mon sujet ne pas avoir d'à-priori concernant ces personnes vivant dans la rue mais, je suis un peu honteux de l'avouer, j'ai le sentiment de n'avoir réellement palpé leur humanité commune à la mienne que pour la première fois hier. Plus que dans les mots j'en ai profondément été conscientisé. Pour conclure, je pense que j'avais besoin de cette expérience pour accueillir ce public en tant que professionnel de santé dans ma pratique future. Merci au samu social et a la faculté de permettre ce type de découverte. Olivier GOUPIL