(2014) Ticket_1483
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(2014) Ticket_1483

Accueil très chaleureux, plus petit comité le week-end. Double-écoute avec deux écoutantes très sympathiques, beaucoup d'appels pour avoir un lit pour la nuit à la Boulangerie ou à Montrouge, dans mon créneau horaire d'arrivée. Mais aussi quelques appels de personnes nouvelles ou d'histoires entendues dans les conversations des régulateurs. Bonne première entrée en matière. Puis réunion dans le garage avec les partants et formation des équipes. Un seul signalement pour notre camion, un homme témoignant dans le film Au Bord du Monde. Début de maraude vers 21h dans nos arrondissements attribués. Premières rencontres très enrichissantes, on donne des cafés, des Bolino, des mots et de l'écoute, et le guide conseil. On fait le point avec les gens pour savoir où ils en sont dans leurs démarches, dans leur suivi, leur accompagnement. Ou où ils en sont tout court. Puis on enchaîne très vite sur des "transports", des gens qui demandent à être transportés à la Boulangerie, porte de Clignancourt, qui accepte les gens pour la nuit par vagues de tranches horaires. On m'explique que depuis certains soucis d'ordre, les gens ne peuvent être pris à la Boulangerie qu'en passant par l'intermédiaire de structures telles que le 115 et leurs camions, si les personnes ont raté les bus "de ramassage" de la Boulangerie. Et donc, en rentrant à Ivry, le régulateur nous apprend qu'il restera des places de libres cette nuit là à la Boulangerie, faute d'avoir reçu assez d'appels. Beaucoup de gens nous arrêtent à ce moment là, beaucoup connaissent le samu social de Paris, mais faute de temps, nous ne pouvons pas nous arrêter. "Raciste !" lance-t-on à notre TS. Ah bon, même le samu social est soumis à l'économie du résultat ? Des fiches à remplir, des plannings à boucler, des statistiques pour compter combien il aura transporté de personnes cette année là jusqu'aux centres d'hébergement. Petit soucis d'organisation des équipes, vers 2h du matin, nous nous retrouvons seul camion sur les 5 de nuit dans Paris pour faire les transports, les autres étant en pause. Nous n'avons pas le temps de rentrer en pause, je ferai donc une nuit complète. J'apprends que CHU ne veut pas uniquement dire Centre Hospitalier Universitaire mais également, Centre d'Hébergement d'Urgence, pour les jeunes de 18 à 25 ans, non nous arrêterons un instant devant l'un deux, par pure coïncidence. Très très enrichissant et équipe vraiment chouette, j'apprends vite que dans la rue à Paris, il n'y a pas de profil type. Dans la soirée, nous rencontrerons plein de gens au vécu différent. Notre TS réussit à faire rire une roumaine, avec son roumain approximatif, notre infirmière engage la conversation avec un inventeur italien, on rencontre un jeune homme qui s'est retrouvé à la rue suite à un interdit bancaire. Et du côté passant, on se rend compte que beaucoup regardent du coin de l'oeil et détournent le regard quand ils se sentent observés, la société de la curiosité avide et du spectacle, et certaines personnes nous racontent qu'elles se font haranguer par les gens ivres "Hé, les clochards !". Départ d'Ivry à 5h du matin passés, il s'agit de trouver un transport en commun pour rentrer à Paris. Je rentrerai finalement à pieds depuis Austerlitz, un nouveau jour se lève pour la ville, pour la rue.