(2016) Ticket_995
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(2016) Ticket_995

La première chose qui m'a marquée dans cette garde, dès la double écoute, est la disproportion énorme entre le nombre d'appels reçus et le nombre de places à la disposition des sans-abris. Les écoutants étaient obligés de refuser des places à 90% des appelants au cas où d'autres, qui seraient dans une situation encore plus difficile, feraient appel à eux. D'autre part, j'ai été assez choquée d'apprendre que la majorité des lits proposés étaient des lits superposés alignés dans un ancien gymnase, où il n'y a aucun respect des règles d'hygiène, aucun accueil pour ceux qui viennent y dormir et presque aucune sécurité. D'ailleurs, beaucoup des sans-abris qui avaient déjà été là-bas refusaient cet hébergement lorsqu'on le leur proposait. De la maraude, j'ai surtout retenu un homme qui vivait depuis 10 ans en bas d'un immeuble, caché derrière des buissons, et qui nous expliquait qu'il partait tous les jours à 7h du matin et ne rentrait que tard le soir pour ne pas importuner les habitants de l'immeuble par sa présence ! Je trouve que cette garde est très importante d'une part sur le plan humain parce qu'elle nous apprend à aborder des personnes qui (même si on a du mal à se l'avouer) peuvent parfois nous faire peur ; et d'autre part sur le plan professionnel puisque l'on est assez souvent amenés à rencontrer parmi les patients des personnes dans le dénuement, et cette expérience permet de mieux comprendre leurs conditions de vie et leur devenir à la sortie de l'hôpital.