J'ai côtoyé une formidable équipe durant cette garde. Finalement, peut-être bien que leur vraie mission c'est de sauvegarder l'humanité de ces personnes sans domicile, vivant en pleine rue et pourtant souvent ignorées de tous. Ça n'a pas l'air si compliqué un sourire, une poignée de main, un échange de paroles. Mais ça peut le devenir, et c'est à ce moment là qu'on se souvient que ce sont des professionnels. J'ai vu de la joie, cette fausse joie que procure l'alcool, et de la désillusion. Pas de tristesse. Ils ont plutôt l'air perdus, comme s'ils habitaient dans un autre monde, en parallèle du nôtre, en se demandant comment y revenir ou y appartenir. Je me suis rendu compte que la plupart se sont tellement éloignés d'une vie sociale, d'une autonomie et de la réalité, que jamais ils ne pourront se réintégrer normalement. La rue, laisse ses traces indélébiles. Certains se battent encore, en général ces derniers ont des enfants, et réussissent à accéder à un hébergement. Pour une semaine parfois moins .. parfois plus, puis ils rappellent▶ pour une prolongation. Et puis certains, ne ◀rappellent plus et finissent par dormir sur un banc, un trottoir, une bouche d'évacuation d'air du métro. Et ils s'abandonnent a leur propre sort. Ce n'est de la faute a personne, mais cela se passerait peut-être mieux si on s'entraidait tous sans rien demander en retour.