(2018) Ticket_328
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(2018) Ticket_328

C’était sans aucun doute la meilleure des gardes que j’ai faites! L’histoire qui m’a le plus marquée est cette femme ayant dormi 1 semaine aux urgences maternité de la Pitié après avoir accouché de son petit garçon. On l’a emmenée dans un hôtel à Villejuif pour la nuit, afin qu’elle puisse se reposer un peu. On lui a également expliqué comment se rendre le lendemain dans un centre d’accueil sur Paris pour se poser un peu et rencontrer une assistante sociale. Elle était totalement perdue à l’idée de prendre le métro seule, avec son enfant et ses trente six milles valises même après lui avoir écrit le trajet. On lui a expliqué qu’il fallait appeler tous les soirs le 115 pour avoir une place d’hébergement le soir, et comment faire pour être prise en charge socialement. Dans ses yeux on lisait la peur du lendemain et de la solitude, l’angoisse d’élever son enfant en ne sachant pas où dormir le soir et j’ai réalisé que cette situation pouvait tous nous toucher et qu’on pouvait se retrouver propulsé dans ces difficultés plus vite qu’on ne le pensait. Ce qui m’a émue c’est également de voir la façon dont l’équipe de maraude, les accueillants dans les centres d’hébergement, les bénévoles des restaus du coeur (que nous avons croisé devant la Pitié) … s’occupent et prennent soin des sans abris. Il n’y a pas de ton ou de position de supériorité, chacun se parle d’égal à égal. J’ai remarqué à quel point l’équipe est prévenante et anticipe tous les besoins des sans abris, mais aussi la gratitude que les ceux-ci leur renvoyaient (« merci pour cette soupe chaude », « ce qui est sûr c’est que vous faites vraiment quelque chose de bien »). Après je n’ai vu que quelques cas, il y a sûrement des sans-abris avec lesquels il existe plus d’agressivité. Je me souviendrai également d’anecdotes qui font chaud au coeur : chanter sur du Supergrass et les PinkFloyd avec Jean-Luc et Didier à l’arrière du camion, le livre de Philippe rempli de dédicaces de passants lui souhaitant du courage.. L’équipe a eu la gentillesse de me déposer devant chez moi après la pause, non sans oublier de recouvrir d’un duvet un monsieur dormant sur une bouche d’aération, juste dans ma rue. Ca fait réfléchir.. Cette garde m’a apporté une prise de conscience indispensable sur le plan personnel mais aussi professionnel. Cela va m’aider à mieux appréhender les difficultés et besoins auxquels font face les patients sans abris que je reçois aux urgences par exemple (même si ma représentation reste à des années lumières de ce qu’ils peuvent vivre). Je reprendrai volontiers une garde si l'occasion se présente.