(2012) Ticket_1882
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(2012) Ticket_1882

Cette garde passée au SAMU social a été pour moi une expérience enrichissante et bouleversante. Tout d’abord, au moment de la double écoute téléphonique du 115, j’ai été très surprise que ce numéro soit en permanence saturé d’appels ! C’est dire l’ampleur de la demande, et le nombre de nécessiteux dans la région parisienne… J’ai par ailleurs une grande admiration pour les personnes répondant à ces appels, dont le travail d’écoute et de compréhension des demandes formulées est souvent difficile (usagers en état d’ébriété, barrière linguistique… ). Au moment de la maraude, j’ai été bouleversée par le nombre de nécessiteux que nous avons croisé en aussi peu de temps, et je dirais même que cette expérience m’a « ouvert les yeux » sur la situation des sans-abris. On pourrait facilement croire que certains sans-abris le sont par choix, par besoin de liberté, de non-volonté de travailler, et que lorsque l’on veut s’en sortir, on s’en sort ; la réalité s’avère tout autre, la grande majorité des usagers que nous avons vu cette nuit ont perdu leur travail, ont par la même été délaissés par leurs familles, ont perdu leur logement, et ont essayé sans succès de retrouver du travail. Bien sûr, le SAMU social et les assistantes sociales cherchent à les aider, mais ils sont souvent impuissants, tant le nombre de sans-abris est important, et tant les employeurs sont réticents à l’idée de les embaucher. C’est pourquoi ils sont nombreux à se décourager et à s’enliser dans leur situation. J’ai été particulièrement choquée par la situation des femmes sans-abris ; elles sont bien moins touchées par la précarité que les hommes, c’est pourquoi les centres d’accueil leur réservent bien moins de places, et celles-ci sont donc rapidement prises, d’autant plus que le nombre de femmes dans la rue est actuellement en augmentation… C’était vraiment très dur de devoir annoncer à de petites mamies de 70 ans qu’elles allaient devoir passer la nuit dehors, par le froid qu’il faisait, car il n’y avait tout simplement plus de places pour elles… En résumé, c’est une expérience que je recommande à tous, elle permet d’ouvrir les yeux sur la misère qui existe dans notre société, réputée pourtant pour sa puissance économique. Cette garde m’a également permis de me rendre compte à quel point les structures permettant d’aider les sans-abris sont peu nombreuses et par la même impuissantes ; et je ne peux m’empêcher de me demander pourquoi les différents gouvernements qui se sont succédés jusqu’à aujourd’hui n’ont pas œuvré pour les développer davantage.