(2017) Ticket_522
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(2017) Ticket_522

Début de la vague de grand froid. Difficile de s'imaginer dormir dehors par ce temps là. Et pourtant, ce fut dur d'entendre l'écoutante du 115 répéter qu'ils n'avaient plus de place en centre d'hébergement aux appelants, tant de "demandes non pourvues". Leurs moyens sont limités, mais pas leur bienveillance. C'est avec plaisir que j'ai enfilé cette grande parka bleue, je me suis dis "elle me protègera du froid, et j'aurai l'air d'un des leurs comme ça" mais je ne m'imaginais pas à ce moment là que je me sentirai autant partie de cette équipe la nuit là. De signalement en signalement, le camion se remplit. De l'inconnu du 115, arrivé en France il y a un mois, qui dormira pour la première fois dans un centre au 115 - et qui s'entendra dire au moment de l'entretien que nous n'avons pas de solution pour l'héberger quotidiennement jusqu'à son rdv d'enregistrement de demande d'asile dans un mois - aux vieilles connaissances de l'association, suivies depuis plus de 10 ans, les vieux de la vieilles. Une main leur sera tendu à tous. Ca tombe bien, ils en ont tous besoin. Que ce soit un bolino ou un café bien chaud, un duvet ou une paire de chaussette, une place en hébergement ou une simple discussion : le constat est clair, l'isolement est violent, le cercle vicieux de la rue est une menace, il faut s'en préserver. Ne pas se laisser aller à ce même cercle ça commence par prendre soin de soi, se respecter, prendre une douche régulièrement, laver ses affaires, bouger, lire, garder contact avec le monde. Tant de choses si difficiles quand une part de la société vous rappelle chaque jour, par son ignorance ou pire son dédain, qu'elle ne compte plus sur vous; que vous êtes ses enfants abandonnés, jetés dans cette grande marmite qu'est la rue. Elle était au congélateur, ce soir là la marmite.