(2015) Ticket_1114
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(2015) Ticket_1114

J'étais très curieuse de découvrir le fonctionnement et les actions du Samu Social, et je dois dire que cette garde a parfaitement répondu à mes attentes et interrogations. Pour commencer j'ai été surprise de constater que l'équipe était très hétéroclite, constituée sur le terrain de personnes jeunes mais surtout engagées à 100% dans leur mission et non des bénévoles comme je l'imaginais. J'ai pu constater tout au long de la nuit l'immense humanité qui habite tous les membres du Samu Social qui, s'ils réalisent leur travail comme n'importe quel salarié, le font avec une dévotion et une sincérité entières. La double-écoute a été plus "choquante" pour moi, en particulier un appel : il s'agissait d'un couple dont la femme était enceinte de 2 mois ; après avoir récupéré les informations liées à leur santé etc, l'écoutante les a informé que malheureusement il n'y avait pas de place dans un centre d'hébergement pour eux cette nuit là, et que donc ils devraient repasser une nuit dans la rue. Le choc m'a saisi quand elle m'a ensuite expliqué que les couples étaient toujours moins prioritaires que les personnes isolées car le 115 part du principe que l'homme protégera la femme en cas d'agression dehors dans la nuit. J'ai réellement réalisé la violence qui pouvait sévir dans la rue, et le danger qu'une nuit dehors représentait pour ceux qui y sont contraints… Pour ma part j'avoue que la maraude m'a ensuite réconciliée avec la nuit : l'équipe était d'une part formidable, mais également les personnes de qui nous allions à la rencontre : je redoutais des insultes, de la violence, or nous étions souvent accueillis avec des sourires et des paroles sympathiques. Nous restions auprès des personnes à la rue le temps d'une discussion autour d'un café chaud, d'écouter leurs doléances ou leurs anecdotes, et le plus impressionnant pour moi fut de constater que jamais ces personnes ne faisaient de demande faramineuse ou impossible, ni ne nous mettaient dans des positions inconfortables, au contraire : leurs demandes étaient toujours complètement réalistes, des chaussettes du café une couverture etc, comme s'ils avaient entièrement accepté leurs situations difficiles à la rue, certains même refusaient les places dans les centres d'hébergement d'urgence. J'en ai été profondément secouée. Il y avait un réel respect entre les personnes à la rue et les travailleurs du Samu Social, et c'est cette mutualité qui m'a le plus impressionnée. Cette garde m'a vraiment beaucoup apaisée sur le plan des relations humaines et du rapport aidant/aidé pour ne pas dire soignant/soigné, qui parfois ne me satisfait pas à l'hôpital où les patients ne disposent pas de leur santé mais la remettent entre les mains des soignants ; c'est tout l'inverse qui s'est produit au Samu Social.