(2016) Ticket_1042
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(2016) Ticket_1042

J'ai commencé la garde par la double écoute puis vers 21h je suis partie en maraude avec un chauffeur qui travaille au Samu Social depuis 3 ans, une infirmière qui y travaille depuis 10 mois et une travailleuse sociale (moniteur éducateur) qui y travaille depuis 1 an. Trois situations m'ont marquée. La première est celle d'une femme qui avait signalé qu'un sans domicile de son quartier était probablement blessé (elle l'avait vu boiter). Quand le Samu Social est arrivé l'homme a accepté un café mais a refusé de parler de sa santé et n'a pas voulu de soins. L'habitante qui l'avait signalé ne comprenait pas que le Samu Social ne puisse pas le forcer à se soigner ou à aller à l'hôpital. La travailleuse social et l'infirmière lui ont alors réexpliqué le fonctionnement du Samu Social et le fait qu'on ne pouvait pas forcer une personne à recevoir des soins. Elles lui ont conseillé d'appeler les pompiers si l'état de cet hommes s'aggravait. L'autre situation qui m'a marquée est celle d'une famille roumaine (1 femme et ses 3 filles de 20 à 6 ans) que nous avons rencontrée vers minuit. Quand nous sommes arrivés, il n'y avait que l'ainée qui surveillait les deux plus petites qui dormaient. Leur mère est arrivée quelques minutes plus tard, elle était partie chercher des cartons. Elles étaient installées sur des marches d'escaliers avec quelques couvertures. Elles étaient en France depuis 10 jours et ne parlaient ni français ni anglais, il a donc fallu appeler ISM interprétariat pour leur expliquer que, malheureusement, comme elles étaient à la rue depuis moins d'un mois, elles ne pouvaient pas bénéficier d'une place d'hôtel pour familles du Samu Social. Nous leur avons donné des sacs de couchage, des gants, des écharpes et du chocolat chaud. Nous leur avons aussi donné des adresses pour manger, prendre des douches et rencontrer des assistantes sociales. Lors de cette situation, j'ai ressenti avec le reste de l'équipe, un énorme sentiment d'impuissance et j'avais presque l'impression de les abandonner. Nous avons rencontré une autre famille vers 1 h du matin (Les 2 grands parents d'une soixantaine d'années, les parents d'une trentaine d'années et les 3 enfants dont le plus jeune venait d'avoir 2 ans). Quand ils ont vu le Samu Social arriver, ils ont tout de suite demandé une chambre d'hôtel. Après avoir appelé le centre de régulation pour savoir s'il y avait des places pour cette famille, l'infirmière a appris que cette famille avait été prise en charge milieu février par le Samu Social du 77 et non pas celui du 75. Il a donc fallu expliquer, une fois de plus en passant par ISM interprétariat, à cette famille qui ne parlait ni le français ni l'anglais, qu'il fallait qu'elle retourne en Seine et Marne pour être prise en charge par le Samu Social du 77 et peut être avoir une chambre d'hôtel. Un sentiment de frustration et d'impuissance nous envahit. Lors des maraudes le Samu Social distribue des boissons chaudes, sacs de couchage...,mais il n' y a pratiquement plus de place dans les centres d'accueil (lors de ma nuit de garde, seul un sans-domicile parmi ceux qu'ont a rencontrés a pu avoir une place dans un centre). Parler avec les gens, essayer de leur trouver une place puis devoir repartir en les laissant dans le froid était vraiment frustrant. Au final, cette garde a été très intéressante, je connaissais le Samu Social de nom mais je ne savais pas ou commençait et ou s'arrêtait on champ d'action. L'équipe avec laquelle je suis partie en maraude était vraiment accueillante, et m'a vraiment bien informée sur le fonctionnement du Samu Social. C'était vraiment enrichissant sur le plan humain et intéressant.