Controverse autour de la convocation

Dates 1697 - 1703

Fiche rédigée par Nicolas Bourgès . Dernière mise à jour le 24 December 2014.

Synopsis

Synopsis

La Convocation est l’assemblée des provinces de Canterbury et York, qui se réunit lorsque l’archevêque le demande, après décret royal. Elle est divisée en une chambre haute, composée des évêques et présidée par l’archevêque, et une chambre basse, composée du doyen et d’un représentant (proctor) de chaque cathédrale, ainsi que de l’archidiacre et de deux représentants du clergé de chaque diocèse, et présidée par le prolocutor, choisi parmi ses pairs. La Convocation se réunit en 1689, après une interruption de vingt-quatre ans, afin de discuter de changements liturgiques, mais la chambre basse fait valoir une opposition tellement forte que la Convocation est suspendue jusqu’en 1700, sujet à l’origine d’une controverse.

En 1697, Francis Atterbury, aumônier du roi Guillaume III et de la reine Marie, se fait le porte-parole de la High Church en publiant un texte qui défend le droit de réunir la Convocation en s’appuyant sur des arguments constitutionnels. Il établit un parallèle avec le Parlement : les deux sont constitués de deux chambres, et ils sont l’émanation la plus haute de l’Église et de l’État respectivement. La Convocation doit par conséquent avoir les mêmes droits que ceux conférés à l’institution parlementaire. Atterbury fait un rappel historique par le biais du roi Edouard I qui, en 1295, avait émis une clause appelée Praemunientes convoquant au Parlement les évêques, ainsi que les autres membres du clergé sous leur autorité. À ses yeux, la loi de soumission du clergé (Submission of the Clergy Act) de 1533, votée sous le règne d’Henri VIII, n’empêche pas la Convocation d’initier des discussions, y compris sur les canons, sans attendre d’autorisation royale.

William Wake, doyen d’Exeter encouragé par l’archevêque de Canterbury Thomas Tenison, répond au nom de la Low Church. Il conteste l’interprétation d’Atterbury et considère que la Convocation doit bénéficier d’une autorisation royale pour se réunir, et ne peut discuter de points doctrinaux ou disciplinaires sans cette même autorisation, plaçant de fait l’État au-dessus de l’Église. Selon lui, il n’est pas nécessaire que la Convocation se réunisse à chaque fois que le Parlement siège : l’assemblée ecclésiastique doit avant tout avoir lieu si le souverain décide que des sujets doivent être débattus. Samuel Hill, rattaché à la prébende de Buckland Dinham (Somerset), affirme au contraire que les synodes sont un droit de l’Église qui précède les lois et institutions séculières.

Atterbury répond à Wake en 1700 dans The Rights, Powers, and Priviledges, of an English Convocation en réitérant ses arguments, qu’il modifie l’année suivante dans une réédition du même texte : la clause Praemunientes confie aux convocations provinciales un statut similaire aux réunions du Parlement. En outre, d’après son interprétation de la loi henricienne, le roi n’intervient qu’après les débats de la Convocation. Enfin, Atterbury s’efforce de montrer que la chambre basse doit devenir indépendante de la chambre haute : les évêques peuvent voter sur des sujets liés à l’Église au sein de la Chambre des Lords, dont ils sont membres, alors que la chambre basse est le seul endroit où les autres membres du clergé peuvent discuter. Ce sont White Kennett, archidiacre de Huntingdon, et Edmund Gibson, recteur de Stisted (Essex), qui publient des réponses pour souligner la confusion d’Atterbury entre assemblées civiles et ecclésiastiques, et accentuer l’autorité de l’évêque. George Hooper, prolocutor de la chambre basse, et William Binckes, membre de la même chambre en 1701-1702, se joignent à la controverse pour en défendre les droits.

La controverse s’arrête en 1703 avec la publication de The State of the Church and Clergy of England, in their Councils, Synods, Convocations, Conventions, and other Publick Assemblies de Wake, qui propose une enquête historique afin de démontrer que le fonctionnement de la Convocation obéit à des principes séculaires qu’Atterbury a cherché à remettre en cause.

Enjeux

Enjeux

• La controverse relative à la Convocation souligne les rapports de force internes à l’Église d’Angleterre consécutifs à la Glorieuse Révolution, qui mettent aux prises pouvoirs spirituel et temporel : la High Church est opposée à la vision érastienne de la Low Church. La Convocation dépend-elle de l’autorité royale, et doit-elle en dépendre ? De plus, la Low Church est davantage encline à accepter la politique de tolérance adoptée par le Parlement en 1689 à l’égard des Dissenters. Ces tensions sont révélatrices de la vision que l’Église a d’elle-même, et de la place qu’elle souhaite occuper vis-à-vis de la sphère politique. Ces préoccupations se retrouvent dans la controverse de Bangor au cours des années 1710, qui va opposer un courant conservateur à un courant latitudinaire. À cause de cette nouvelle controverse, la Convocation est ajournée jusqu’en 1854.

• L’enjeu est également social : à une époque où certains de ses membres dénoncent une société dévoyée, la High Church voit l’Église comme le vecteur à utiliser pour la réforme des mœurs, surtout après le refus du Parlement en 1695 de renouveler le Licensing Act de 1662 qui régulait la presse. La Low Church préfère s’appuyer sur le travail de sociétés qui ne dépendent pas forcément de l’autorité ecclésiastique (la Society for the Reformation of Manners, fondée en 1691, en est un exemple). 

Chronologie

Chronologie

• 1295 : clause Praemunientes, convoquant les évêques et les membres du clergé sous leur autorité au Parlement.

• 1533 : loi de soumission du clergé.

• 1664-1689 : interruption de la Convocation.

• 1689 : loi de Tolérance.

• 1691 : création de la Society for the Reformation of Manners.

• 1695 : non-renouvellement du Licensing Act.

• 1697 : publication de A Letter to a Convocation-Man, Concerning the Rights, Powers, and Priviledges of that Body de Francis Atterbury. Réponse de William Wake, The Authority of Christian Princes over their Ecclesiastical Synods Asserted.

• 1700 : publication de la première édition de The Rights, Powers, and Priviledges, of an English Convocation de Francis Atterbury. La Convocation se réunit de nouveau.

• 1701 : publication de la deuxième édition de The Rights, Powers, and Priviledges, of an English Convocation. Publication des textes de William Binckes, Edmund Gibson, George Hooper, White Kennett.

• 1703 : publication de The State of the Church and Clergy of England, in their Councils, Synods, Convocations, Conventions, and Other Publick Assemblies de William Wake.

Noms propres

Noms propres

Références

Références

Corpus

• Atterbury, Francis, A Letter to a Convocation-Man, Concerning the Rights, Powers, and Priviledges of that Body, Londres, 1697.

• Atterbury, Francis, The Rights, Powers, and Priviledges, of an English Convocation, Stated and Vindicated in Answer to a Late Book of Dr. Wake’s, Entituled, The Authority of Christian Princes over their Ecclesiastical Synods Asserted, &c., and to Several Other Pieces, Londres, 1700.

• Atterbury, Francis, Additions to the First Edition of The Rights, Powers, and Privileges of an English Convocation, Stated and Vindicated. In Answer to a Late Book of Dr. Wake's, Entituled, The Authority of Christian Princes over their Ecclesiastical Synods Asserted, &c. and to Several Other Pieces, Londres, 1701.

• Atterbury, Francis, The Power of the Lower House of Convocation to Adjourn it self, Vindicated from the Misrepresentations of a Late Paper, Entituled, A Letter to a Friend in the Country, Concerning the Proceedings of the Present Convocation, Londres, 1701.

• Binckes, William, An Expedient Propos’d : Or, the Occasions of the Late Controversie in Convocation Consider’d, And a Method of Adjournments Pointed Out Consistently with the Claims of Both Houses, Whereby All Disputes in that Matter May for the Future Be Avoided. In a Letter to the Author of a Late book Entitled, The Right of the Archbishop to Continue and Prorogue the Whole Convocation Asserted, &c. With Some Queries Put to the Author in Relation to his Book, Londres, 1701.

• Gibson, Edmund, A Letter to a Friend in the Country, Concerning the Proceedings of the Present Convocation, Londres, 1701.

• Gibson, Edmund, The Right of the Archbishop to Continue or Prorogue the Whole Convocation: Asserted in a Second Letter; by Way of Reply to a Pamphlet, Entitled, The Power of the Lower-House of Convocation to Adjourn it self, &c. And Also to a Late Book, Entitled, A Narrative of the Proceedings of the Lower-House, &c. with the Publisher's Preface: As far as they Relate to the Point of Continuation, Londres, 1701.

• Gibson, Edmund, The Schedule Review'd. or, The right of the Archbishop to Continue or Prorogue the Whole Convocation, Clear'd from the Exceptions of a Late Vindication of the Narrative of the Lower-House, as to the Point of Adjournments, in Two Parts. And of a Book Entitl'd, The Case of the Schedule Stated. With a Letter to the Author of the Case of the Schedule, from the Answerer of the Third Letter Concerning the Parliament-Writs, &c., Londres, 1702.

• Hill, Samuel, Municipum Ecclesiasticum, or, The Rights, Liberties, and Authorities of the Christian Church Asserted Against All Oppressive Doctrines, and Constitutions, Occasioned by Dr. Wake's Book, Concerning the Authority of Christian Princes over Ecclesiastical Synods, &c., Londres, 1697.

• Hooper, George, The Narrative of the Lower House of Convocation, as to the Point of Adjournments, Vindicated from the Exceptions of a Letter Intitled, The Right of the Archbishop to Continue or Prorogue the Whole Convocation, Londres, 1701 (?).

• Kennett, White, Ecclesiastical Synods and Parliamentary Convocations in the Church of England Historically Stated, and Justly Vindicated from the Misrepresentations of Mr. Atterbury, Londres, 1701

• Wake, William, The Authority of Christian Princes over their Ecclesiastical Synods Asserted: With Particular Respect to the Convocations of the Clergy of the Realm and Church of England. Occasion’d by a Late Pamphlet, Intituled, A Letter to a Convocation Man, &c., Londres, 1697.

• Wake, William, The State of the Church and Clergy of England, in their Councils, Synods, Convocations, Conventions, and Other Publick Assemblies; Historically Deduced From the Conversion of the Saxons, To the Present Times. With A Large Appendix of Original Writs, and Other Instruments, Londres, 1703.

Bibliographie critique

• Cornwall, Robert D., Visible and Apostolic: The Constitution of the Church in High Church Anglican and Non-Juror Thought, Newark, University of Delaware Press, 1993, p. 89-93.

• Goldie, Mark, « The Non-Jurors, Episcopacy, and the Origins of the Convocation Controversy », in Cruickshanks, Eveline (éd.), Ideology and Conspiracy: Aspects of Jacobitism, 1689-1759, Edimbourg, John Donald, 1982, p. 15-35.

• Lathbury, Thomas, A History of the Convocation of the Church of England: Being an Account of the Proceedings of Anglican Ecclesiastical Councils from the Earliest Period, Londres, John W. Parker, 1842, 415 p.

• Rupp, Ernest Gordon, Religion in England 1688-1791, Oxford, Oxford University Press, 1986, p. 56-64.

• Switzer, Gerald B., « The Suppression of Convocation in the Church of England », Church History, volume 1, n°3, septembre 1932, p. 150-162.

Liens

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